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Le
présent se prépare à partir du futur 3
pages,
Trocmé-Fabre H., J'apprends donc je suis,
éd. Organisation, Paris, 1994, 272 p.
Extrait
« .../...
- Les systèmes éducatifs,
en général, reflètent la
société pour laquelle ils forment les
citoyens.
- Cette société est
elle-même l'image de la culture qu'elle secrète et
qui l'a sécrétée.
- Quant à la culture, elle s'est
formée au cours de millions d'années s'enracinant
dans le vieux cerveau mammifère de l'homme. Peu à
peu se forme ce qu'Edward Hall appelle la culture inconsciente, la
culture cachée ou encore l'infra-culture qui moule, forme
(et déforme), et dont la force est d'autant plus grande
qu'elle est sous-jacente.
- Les facteurs qui différencient les
cultures entre elles sont nombreux. Ceux qui semblent peser le plus
lourdement sont les concepts de Temps et d'Espace. Ils
déterminent, par exemple, plus qu'aucun autre, les
différences entre les langues, tant du point de vue
syntaxique que phonétique et lexical.
- La structure des méthodes
d'éducation, beaucoup plus que leur contenu, influence les
processus mentaux, emprisonne la pensée dans un moule et la
coule dans le béton des contraintes conceptuelles et
perceptuelles.L'intelligence est souvent confondue avec la
conformité aux normes et la capacité d'adaptation
au système...
- Les notions d'apprentissage et
d'éducation sont profondément marquées
par les différences culturelles.
- Pour les uns, il s'agit d'imiter un modèle ;
pour d'autres, appliquer un savoir ou un savoir-faire,
répondre à un stimulus ; pour d'autres encore,
démontrer, mémoriser, donner la
réponse juste, etc.
- A l'intérieur d'une même culture,
la diversité des conceptions de l'apprentissage est tout
aussi grande. Selon que l'on est psychologue, biologiste. sociologue,
linguiste ou mathématicien... on aura sa propre
pédagogie
Le présent se
prépare à partir du futur
- Avec les technologies nouvelles, et tout
spécialement celles qui président à la
communication de l'information, on s'achemine progressivement vers un
système dans lequel l'information ne sera plus
simplement traitée par le récepteur mais
sélectionnée, choisie, triée.
- Le
présent se prépare à partir du futur. Plus
que jamais, le cerveau des générations de demain
doit être prêt à prendre l'information
et à la traiter. Le paradoxe est que l'évolution
du contexte informationnel se fait précisément
dans le sens d'une surabondance d'informations visuelles et auditives;
mais l'oeil et l'oreille, saturés d'informations, ne sont
plus ce qu'ils étaient.
- Le verbe latin educare signifie nourrir,
et évoque une image beaucoup plus positive de l'apprenant,
car elle tient compte de son potentiel et de ses ressources que
l'école a le devoir de développer.
- Cette voie nous rapproche du vieil adage chinois qui
nous dit que le meilleur moyen de nourrir une personne n'est pas de lui
donner un poisson mais de lui apprendre à pécher.
- Si un esprit chagrin évoque le dicton
cher au monde anglo-saxon selon lequel on n'amène pas
à l'abreuvoir un cheval qui n'a pas soif, le monde de
l'école et de la formation peut sans doute s'interroger avec
profit sur la question de la boisson offerte et des moyens de donner
soif : quelques crackers salés et poivrés,
offerts au préalable, ne déclencheraient-ils pas
la soif ?
L'adaptation
à
l'environnement
- Apprendre, c'est s'adapter.
- Rappelons qu'historiquement
le premier acte
d'apprentissage pourrait être vieux de cent millions
d'années et dater du moment ou notre ancêtre
mammifère est devenu un animal à sang chaud. Son
organisme dut s'adapter pour survivre, apprendre à
reconnaître et identifier les facteurs de
réchauffement et de refroidissement survenant dans
l'environnement pour agir en conséquence faire une
tanière, émigrer, hiberner, etc.
- A la veille du
XXI° siècle,
l'adaptation à l'environnement est une
nécessité tout aussi vitale qu'il y a cent
millions d'années.
-
De même
qu'il n'y a pas une seule
façon de pécher, il n'y a pas une seule
façon d 'apprendre.
- Pour
Gregory Bateson, prétendre qu'il n'y a qu'une seule
façon d'apprendre « revient à affirmer
que le seul moyen de faire rôtir le cochon c'est de mettre le
feu à la maison ».
- Dans l'acquisition des connaissances, il y a un point de
départ, un parcours et un point d 'arrivée. Quel
que soit l'itinéraire, celui qui l'a parcouru n'est plus le
même à l'arrivée : il a
changé, il s'est enrichi. La plupart des apprentissages qui
ne réussissent pas, échouent parce que le
parcours n'est pas évident pour l'apprenant : le point de
départ, l'itinéraire, ou l'objectif à
atteindre sont flous.
La faute, l'erreur de l'apprenant aux yeux de
l'enseignant, est - devrait être - essentiellement un
repère sur l'itinéraire, un indice de la
stratégie utilisée ou
évitée pour atteindre l'objectif, et non un point
de non-retour marqué de rouge.
L'hygiène cérébrale doit
faire partie de la pédagogie
- Rappelons pour mémoire, que nous consommons
chaque jour 15 kg d'air et 4 kg d'oxygène Sur ces 4 kg, le
cerveau en consomme à lui tout seul 20 %.
- Lumière naturelle, alimentation.
alternances, pauses, affectivité, vie relationnelle,
connaissances langage(s) sont des nourritures indispensables
à la vie cérébrale et doivent
être intégrées dans une
démarche pédagogique cohérente.
Le cerveau
ne prend que ce qu'il sélectionne.
- L'intériorité de l'apprenant, sa
verticalité, est à développer a partir
de son corps et l'enseignant d'éducation physique ne devrait
pas être le seul à s'en préoccuper.
- L'apprenant est un tout lorsqu'il écrit, ou
lorsqu'il lit, la position de son dos est aussi importante que
lorsqu'il marche. Sa colonne vertébrale est son
mât, son axe.
- Il en est de même de sa respiration : c'est
un mât mental et même, pour certains, un mat
spirituel. Il est important d'aider l'apprenant à ne pas
confier son apprentissage à son seul cortex, sous
prétexte qu'il s'agit d'activités
cognitives.
- La tâche du formateur est de l'aider à
prendre conscience du rôle de son corps pour qu'il fasse
confiance à la sensorialité qui est la sienne, et
qu'il ne dépende pas de celle d'un autre, fusse-t-elle celle
du maître ou d'un parent. Ce travail de prise de conscience
doit être celui de tous les enseignants quelle que soit leur
discipline, et naturellement aussi de l'institution et des parents.
- Non seulement le travail doit continuer a se faire dans
les cinq modalités sensorielles (on en abandonne trois sur
cinq trop tôt. pour ne garder que la vision et l'audition et
une motricité réduite à deux heures
d'éducation physique par semaine !), mais l'apprenant
s'enrichirait considérablement s'il savait être le
témoin de ce qu'il voit, entend, ressent, etc...
- Il apprendrait à être moins
vulnérable, et son esprit critique augmenterait. Un moyen
puissant d'aider l'apprenant dans sa prise d'information sensorielle
est de varier les sources d'information en donnant la même
information sous différentes formes. Des ateliers offrent
l'information sous forme de textes, d'images (diapositives, cassettes)
mime ou une manipulation d'objets ; l'apprenant choisit l'atelier par
lequel il veut commencer sous la forme qu'il
préfère, mais il sait qu'il devra passer par tous
les ateliers.
- La véritable relation d'aide consiste
à ne pas faire plus de 50% du chemin... Au-delà,
la personne qu'on veut aider est dévalorisée,
à ses propres yeux comme à ceux du formateur ou
de l'enseignant.
- L'importance de l'image que l'apprenant a de lui est
primordiale. Si cette image est négative, pour qu'elle
devienne positive, il faut évidemment qu'il y ait un
changement, pas un changement d'état mais de
comportement.
- Faciliter
la mémorisation
- La mémoire commence dès la
prise d'information, et souvent même avant le premier contact
avec l'information, puisque l'attitude qu'on a envers une
tâche à accomplir prépare
déjà l'encodage et la future
compréhension.
-
- La
mémorisation est consolidée par des
réactivations a des moments favorables qu'il est bon de
connaître : dix minutes après la prise
d'information, puis un jour, une semaine, un mois, six mois plus tard.
- Ces réactivations, convenablement
programmées, prennent des formes variées :
résumé, relecture de notes, mise en
schéma, classement, discussion, rapport, etc. Elles
demandent très peu de temps (cinq à dix minutes
chacune) ; le calcul est facile : six fois cinq minutes. Elles
permettent, en ne mobilisant qu'à peine plus d'une
demi-heure, d'envoyer une information en mémoire.
- Au-delà de son rôle
structurant pour la personnalité et l'identité,
l'imagerie mentale a donc un rôle fonctionnel d'aide
à la mémorisation. Les
procédés mnémotechniques,
rappelons-le, sont entièrement basés sur
l'imagerie mentale, visuelle ou auditive, plus rarement
kinesthésique.
-
Allan Paivio a
souligné trois aspects des images mentales susceptibles de
faciliter le rappel :
-
- une image
interactive associant deux mots ou plus :
-
- l'aspect concret des
mots ;
-
- la
représentation imagée de l'objet ou du concept.
- Mémoires et images mentales semblent
résulter de mécanismes voisins ou communs :
association ou connectivité.
- .../...»
28 septembre 1998
Dr Lucien Mias
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