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L'accompagnement naturel
Une communication ouverte, l'échange des émotions et le soutien mutuel contribuent aussi à mieux comprendre le cheminement du malade tout en renforçant les liens entre les membres de la famille.
Le bénévolat
La façon d'être auprès des malades
Après l'accueil, l'accompagnement se poursuit
et s'adapte aux besoins du moment, des besoins aussi variés
que peuvent l'être les personnes et les situations.
À l'occasion, les bénévoles servent d'intermédiaires entre les familles et les professionnels. Si la famille en exprime le désir, les bénévoles demeurent présents au moment du décès.
Certains proches se sentent rassurés par la
présence d'un membre de l'équipe,
médecin, infirmière, aumônier ou
bénévole, tandis que d'autres
préfèrent vivre ce moment dans
l'intimité.
Comme derniers gestes de présence, les
bénévoles peuvent répondre aux
questions des proches sur les démarches à suivre
après le décès et les accompagner
jusqu'au moment de leur départ de l'hôpital.
La façon d'être des bénévoles auprès des soignants
Comment s'exerce la présence des bénévoles auprès du personnel ? Soulignons d'abord que les bénévoles ne posent pas d'actes reliés aux soins infirmiers et ne donnent jamais d'avis sur l'état de santé du malade ou sur sa médication. Cette règle s'applique à tous les bénévoles, même s'ils sont infirmiers ou membres du milieu hospitalier.
Alors, comment peuvent-ils venir en aide au personnel ? Rester auprès d'un patient anxieux qui appelle constamment, en assister un autre qui est agité ou confus, veiller sur un malade qui est en difficulté respiratoire, voilà autant de moyens d'alléger la tâche de l'infirmière et de lui permettre d'être auprès d'autres patients qui ont besoin d'elle.
Passer quelque temps avec une famille qui vit difficilement la séparation imminente s'avère aussi une bonne façon de soutenir le personnel soignant.
Les échanges spontanés à propos des joies, des peines, des difficultés vécues, en équipe ou individuellement, constituent également une forme de soutien réciproque entre soignants et bénévoles.
La formation des bénévoles
Parce que les bénévoles sont appelés à travailler en milieu hospitalier, d'une part, et en équipe pluridisciplinaire, d'autre part, il importe de leur offrir une formation adaptée.
Les bénévoles sélectionnés doivent recevoir un cours théorique (six heures) donné par la coordonnatrice.
Ce cours aborde les principes de base de l'accompagnement en fin de vie ainsi que les particularités d'ordre fonctionnel et relationnel, de façon que l'engagement des bénévoles soit fondé dès le départ sur le projet de soins déjà établi par l'équipe en place.
Les bénévoles poursuivent ensuite une formation pratique d'environ soixante heures sous la supervision d'un pair expérimenté. Ce dernier offre au débutant l'encadrement nécessaire et lui permet ainsi de manifester ses aptitudes et d'acquérir un savoir-faire dans un climat de sécurité émotive, sans pour autant être exposé à faire face seul et trop rapidement aux situations difficiles.
Bien entendu, la formatrice ou le formateur n'initie pas le nouveau bénévole qu'aux attitudes appropriées ; elle ou il lui apprend également les mille et un gestes concrets qu'il sera appelé à faire, le renseigne sur les lieux et les choses, tous des aspects indispensables.
Dans le cadre de cet entraînement, les bénévoles sont aussi invités à participer à la réunion hebdomadaire de révision et de mise à jour, qui regroupe des représentants de diverses disciplines (médecins, infirmières, travailleuse sociale, psychiatre, diététicienne, musicothérapeute, aumônier, responsable de l'aide aux personnes en deuil et bénévoles). Cette réunion, habituellement supervisée par le psychiatre consultant, sert en premier lieu à évaluer et à ajuster les interventions médicales, infirmières et psychosociales.
Elle offre aux membres de l'équipe le soutien nécessaire et assure la diffusion d'une information d'autant plus intéressante qu'elle est multidisciplinaire, permettant ainsi de poser des actes plus éclairés et mieux adaptés aux besoins de chaque patient et de chaque famille.
Cette rencontre est également le moment de faire le point et de vérifier si tous les intervenants sont sur la même longueur d'onde, adoptent une démarche cohérente et restent fidèles à la philosophie commune. La réunion offre aussi aux participants l'occasion de faire part des difficultés, des tensions parfois ressenties dans leurs rapports avec les patients ou leurs familles et d'éviter ainsi l'accumulation de frustrations et d'incompréhensions susceptibles de perturber leur travail. Cet échange permet aux membres du personnel et aux bénévoles de prendre conscience qu'ils ne sont pas les seuls à éprouver ces difficultés. Bien sûr, le fait d'exprimer tout cela aide à diminuer les tensions.
La dernière étape de cette réunion est consacrée aux décès récents et donne lieu à l'échange des émotions suscitées par la perte de personnes auxquelles des membres de l'équipe s'étaient attachés. L'accompagnement bénévole fait appel à des connaissances reliées à divers domaines. Selon les circonstances, ces références sont utiles à l'accompagnant pour évaluer les besoins immédiats ; elles lui apportent une meilleure compréhension de la situation et une assurance quant aux actes à poser. Certaines informations sont particulièrement importantes sur le plan de la cohésion et du fonctionnement de l'équipe. En outre, elles expliquent le rôle, le travail et l'orientation des accompagnants ; renseignent sur la nature et l'évolution de certains projets ; mettent à jour et complètent des données relatives au travail quotidien ; enseignent ou rappellent les préceptes de base.
Un comité de formation continue constitué de bénévoles et de leur coordonnatrice a été créé dans le but de poursuivre cet enseignement.
Tous les deux mois, des rencontres avec des professionnels offrent aux bénévoles l'occasion d'échanger sur divers sujets reliés à leur travail (l'écoute, la musicothérapie, la confusion des malades, l'intervention psychosociale, la spiritualité, entre autres).
La bibliothèque et le centre de documentation de l'Unité sont aussi à la disposition des bénévoles. Des articles, des parutions récentes et diverses informations reliées à l'accompagnement ou à des sujets connexes circulent régulièrement parmi les membres de l'équipe.
La participation aux congrès, colloques, conférences, exposés et ateliers sur divers aspects de l'accompagnement en fin de vie constitue de plus une source importante d'enseignement et de ressourcement. La formation continue s'exerce aussi en dehors des réunions, de façon informelle.
Dans le quotidien, les communications importantes, les informations essentielles sur les gestes à faire sont partagées et discutées avec les équipes médicale, soignante, psychosociale, pastorale et autres. Par définition, cet échange se fait dans les deux sens, c'est-à-dire que tous ces renseignements sont acheminés à l'équipe des bénévoles, soit les décisions reliées aux changements d'attitudes ou d'orientation, les raisons de ces virages, l'explication de ces comportements.
Enfin, les activités sociales et les rapports interpersonnels et amicaux, à l'Unité comme à l'extérieur, fournissent également l'occasion d'échanges multiples souvent reliés au travail et peuvent être considérés comme un élargissement de la formation continue. Ces activités permettent de cimenter, de resserrer les liens de l'équipe.
L'intégration des bénévoles dans l'équipe professionnelle
L'équipe des bénévoles est complémentaire et ne devrait en aucun cas priver le personnel soignant ou les familles de leur place respective auprès des malades. L'une de ses particularités vient de ce qu'elle est intégrée dans une équipe multidisciplinaire formée de médecins, psychiatre, infirmières, infirmières auxiliaires, préposés, travailleuse sociale, aumônier, diététicienne, musicothérapeute, responsable du suivi de deuil.
Les bénévoles ne travaillent qu'en concertation et avec la participation de ces professionnels. L'intégration des bénévoles dans une équipe de professionnels ne s'effectue pas à sens unique et comporte des préalables essentiels dont le plus important est sans contredit le désir, l'intention d'intégrer l'accompagnement des bénévoles et d'accepter ceux-ci dans l'équipe. Car ils n'auraient jamais le sentiment d'être intégrés ni la conviction d'être utiles si les professionnels n'étaient pas d'abord ouverts, accueillants et respectueux à leur égard.
En revanche, si les professionnels ont choisi d'intégrer les bénévoles dans leur équipe, il est important qu'ils aient, dès le début, l'occasion d'exprimer (en collaboration avec la responsable des bénévoles) leurs besoins et leurs attentes face à ce bénévolat. Puisqu'elle est responsable de la formation de l'équipe, il est essentiel que la coordinatrice des bénévoles soit choisie et acceptée, sans restriction, par l'équipe multidisciplinaire, qu'elle partage la philosophie commune et qu'elle soit à l'écoute des besoins des soignants.
Bien intégrée à cette équipe, la responsable pourra établir le lien entre les représentants des autres disciplines et les bénévoles, transmettre et maintenir chez ces derniers les valeurs fondamentales ainsi que les priorités fonctionnelles et relationnelles.
Ce sont les bénévoles qui s'engagent dans le milieu hospitalier et non l'inverse. Ce milieu complexe auquel ils se joignent n'est pas un cadre facile ; la transparence, la capacité de ne pas empiéter sur le terrain des professionnels, de se référer aux personnes-ressources, le professionnalisme (par opposition à l'amateurisme) sont des éléments essentiels à leur rôle d'accompagnant.
Les bénévoles doivent trouver auprès de leur coordonnatrice un « agent de communication» entre eux et les soignants ainsi qu'un soutien efficace et constant. Les différentes pathologies, les nombreux parents et amis, la durée plus ou moins longue des séjours, la diversité des personnalités qui se côtoient à l'Unité, ainsi que la rotation des équipes, imposent un rythme changeant qui nécessite une adaptation incessante.
Des périodes de stabilité relative alternent avec des cycles plus occupés. L'accompagnant bénévole fait face à beaucoup d'imprévus et il se trouve souvent au coeur d'une dynamique nouvelle pour lui. Dans un tel contexte, si la valeur du travail est étroitement liée à la qualité des gens en place, elle dépend aussi de structures solides et de mécanismes souples qui facilitent l'articulation et la cohésion de l'équipe entière.
Sur le plan fonctionnel, les rapports (transmission des données), les communications verbales et écrites, les échanges formels et informels, l'accessibilité aux professionnels et la disponibilité de ces derniers sont des éléments indispensables.
Plus spécifiquement, comme ce sont les infirmières qui assurent la continuité des services de soins, le premier rapport matinal donné aux bénévoles par l'infirmière chef est précieux puisqu'il permet d'identifier les besoins immédiats, de dresser le plan général de la journée, et ainsi d'orienter leurs activités.
Au cours de la journée, les bénévoles en place transmettent à ceux qui leur succèdent les données relatives à l'évolution des événements, toujours en coordination avec leur responsable et avec les soignants.
On utilise un cahier où sont consignées des observations pertinentes pour compléter l'information. Ce cahier, accessible à toute l'équipe, ne contient que des données relatives à l'accompagnement et non d'ordre professionnel.
À cause de la nature même de leur engagement, on ne peut pas exiger des bénévoles plus de temps qu'ils ne peuvent en consacrer au service des malades, car ces moments de générosité et d'humanisme empiètent souvent sur leurs obligations familiales, sociales ou autres. Par ailleurs, des périodes de participation trop longues et trop rapprochées risquent d'entraîner une certaine usure émotive, surtout en contexte de fin de vie où les décès sont fréquents.
Ces deux raisons expliquent le roulement observé dans les périodes de présence des bénévoles. Ces périodes de présence, qui varient entre cinq et huit heures par semaine, sont en général assidues, assurant ainsi continuité et stabilité dans les rapports interpersonnels. Cette forme de relève continue, en plus de diminuer les risques d'usure, apporte une « fraîcheur » renouvelée tout en offrant aux malades, aux familles et aux soignants un large éventail d'accompagnants.
Un tel fonctionnement contribue grandement à la richesse de l'équipe et à la valeur du soutien qu'offrent les bénévoles, constituent aussi des facteurs d'intégration importants tout comme les liens de camaraderie, d'amitié et de tendresse qui se nouent entre les membres de l'équipe.
L'accompagnement des personnes en fin de vie est bien sûr affaire de compétence professionnelle, mais aussi de compétence humaine.
Chaque milieu se caractérise par ses structures, ses besoins, ses ressources, ses avantages et ses inconvénients et ce n'est qu'en tenant compte de toutes ces particularités qu'il est possible de créer une organisation physique et humaine adéquate.
Cette approche globale laisse place à l'imagination, à l'innovation et à l'adaptation.
Il n'est pas facile de mettre sur pied une équipe de bénévoles et de l'intégrer à celle des professionnels, à moins d'obtenir de ces derniers leur consentement et leur complicité.
Professionnels et bénévoles forment une équipe qui peut être d'une grande fragilité, certes, mais aussi d'une force insoupçonnée grâce à une complicité rassurante. L'équipe peut assurer un soutien efficace et fournir une tendresse réconfortante sans lesquels il serait difficile de résister aux départs successifs des malades et des familles avec lesquels très souvent on a tissé des liens affectifs profonds.