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 Havelock Ellis - Études de psychologie sexuelle
Éd. Mercure de France 1964 (1°éd. 1935) - Huit volumes
H. Ellis, médecin anglais, né en 1859 et décédé à 80 ans en 1939, a accumulé les observations sur les coutumes et les moeurs, études biologiques, psychologiques, culturelles. Il s'est attaché aux aspects conscients de la sexualité alors que Freud - qu'il a connu - débusquait l'inconscient après Charcot.
Beaucoup de faits relevés ont disparu de nos jours mais expliquent certaines idées culturelles et le comportement des personnes âgées nées avant 1935.
 L'ouïe
Tome II - Chapitre I   images/logoPdf8k.jpg20 pages
Les notes de bas de page ont été incluses dans le texte. 
NDA = note de l'auteur en 1935 ; NDÉ : note de l'éditeur en 1964
« - La base physiologique du rythme. - Le rythme comme stimulus physiologique. - Le rapport intime entre le rythme et le mouvement. - L'influence physiologique de la musique sur l'action musculaire, la circulation la respiration etc. - La place de la musique dans la sélection sexuelle chez les animaux inférieurs. - Sa place relativement petite dans la courtisation des mammifères. - Le larynx et la voix chez l'homme. - L'importance des changements de la puberté. - Les croyances anciennes sur l'influence de la musique dans la morale, l'éducation et la médecine. - Son emploi thérapeutique. - L'importance de l'intérêt pour la musique à l'époque de la puberté. - Les hommes sont relativement peu sensibles à l'influence sexuelle spécifique de la musique. - Rareté des perversions sexuelles sur la base du sens de l'ouïe. - Le rôle de la musique dans la courtisation humaine primitive. - Les femmes sont plus sensibles à l'influence sexuelle spécifique de la musique et de la voix.
Le sens du rythme sur lequel on peut dire que les effets excitants sensoriels de l'ouïe comme de la musique reposent en dernier lieu, peut probablement être regardé comme une qualité fondamentale du tissu neuro-musculaire. Non seulement les principales fonctions physiologiques du corps, comme la respiration et la circulation, sont rythmiques d'une manière déterminée, mais nos sens communiquent avec persistance du rythme à une succession absolument uniforme de sensations. Bien que cette opinion soit encore sujette à discussion, il parait probable que ce rythme est le résultat des sensations kinesthésiques, des sensations qui naissent du mouvement ou de la tension qui commence d'une manière réflexe dans les muscles par les stimuli externes, et qui s'imposent aux sensations ainsi groupées. (Ce point de vue a été plus spécialement développé par J.-B. Miner, Motor, visual and applied Rythms, Psychogical Review, Monograph Supplements, t. V, n° 4, 190)
Nous pouvons par conséquent dire, avec Wilks, que la musique semble avoir eu son origine dans l'action musculaire.(Sir S. Wilks, Medical Magazine, janvier 1894. - Voir Clifford Albutt, Music, Rythm and Muscle, Nature, 8 février 1894.)
Quelle que soit son origine exacte, le rythme est certainement imprimé dans nos organismes d'une manière très profonde. Le résultat en est que tout ce qui se prête à la tendance rythmique, exerce sur nous une influence stimulante et excitante très nette. 
(Ces observations sont si vraies que des méthodes psychothérapiques contemporaines mettent la rééducation des perÏptions rythmiques au premier plan, chez les malades mentaux (schizophrènes) et chez les enfants débiles mentaux. Chez ces derniers, la méthode Ramain, entre autres obtient des améliorations remarquables des capacités motrices, voire intellectuelles, par des séances quotidiennes d'exercices rythmés par la musique. Cf. numéro spécial de la revue « Sauvegarde de l'Enfance), 1961, consacrée à « la rééducation psycho-motrice » (N. D. É.)).
Le rythme est un stimulant au travail, parce que toute action musculaire est stimulée par le rythme simple ou sous forme plus développée, comme musique. 
Bucher et Wundt ont retrouvé (Bucher, Arbeit und Rhythmus, 3e éd., 1902 ; Wundt Volkerpsychologie, 1900, part. 1, p. 26) son origine principale ou exclusive dans des accompagnements vocaux rythmiques au travail systématisé. Mais cette opinion ne peut pas être acceptée. Même de nos jours on peut à peine dire que le travail systématisé existe chez la plupart des races primitives. Il est beaucoup plus probable que le chant rythmique est né à une période antérieure à l'origine du travail systématisé et qu'il dérive des danses primitives guerrières, religieuses et érotiques, qu'on rencontre de nos jours encore, à un degré très développé, chez les Australiens et d'autres races sauvages, qui ignorent le travail coordonné et systématisé. Il n'y a, par contre, aucun doute qu'à l'apparition du travail systématisé on ait reconnu aussitôt et partout l'importance du rythme vocal pour stimuler l'énergie du travail. Bucher a réuni des exemples innombrables de cette association. 
Nous avons dans la musique des marches militaires et dans les chansons des marins, lorsqu'ils manoeuvrent les voiles, des exemples qui se sont conservés universellement dans la civilisation, malgré le fait que la stimulation rythmique du travail, tout en reposant sur une base physiologique solide, a tendance à s'éteindre dans la civilisation. On peut même démontrer en laboratoire l'influence du rythme simple sur l'augmentation de ]a somme de travail.
(Se basant sur des études statistiques de psychologie industrielle et sociale, on tend actuellement à introduire la musique dans les usines et les grands magasins pour stimuler le travail ou les ventes (N. D. É.)).
Féré a découvert au moyen de l'ergographe qu'un groupement rythmique des mouvements causait une augmentation de l'énergie qui souvent dédommageait largement de la perte de temps causée par le rythme. (Féré s'occupe en détail de cette question, dans son livre Travail et Plaisir, 1904. chap. III, Influence du rythme sur le travail (N. D. A.)
Le rythme est l'élément le plus primitif et le plus fondamental de la musique. 
Wallaschek (Wallaschek, Primitive Music.) et la plupart des autres auteurs sur ce sujet s'accordent à ce propos. Un anthropologue américain écrit : « Le rythme précède naturellement le développement de toute perception subtile des différences de diapason, de mesure ou de tonalité. La plupart des chansons amérindiennes, sinon toutes, sont aussi strictement des répétitions avec variations d'un motif que le sont les mouvements d'une symphonie de Mozart ou de Beethoven. » (Fillmore. Primitive Scales and Rythms, Proceedings of the International Congress of Anthropology, Chicago, 1893.) 
« Dans toute musique primitive, affirme Alice C. Fletcher , le rythme est fortement développé. Le roulement du tambour et le fracas aigu des crécelles s'opposent l'un à l'autre et s'opposent ensemble à la voix. On a dit que les musiciens ne trouvent pas autant leur plaisir dans la tonalité du chant que dans les sons mesurés arrangés dans un rythme contradictoire et qui, par leur choc, troublent les nerfs et poussent le corps vers l'action. Car la voix qui à elle seule porte l'intonation est souvent subordonnée et traitée comme un instrument additionnel.» (A. C. Fletcher. Love Songs among the Omaha Indians, Proccedings Intern. Congress of Anthr. Chicago, 189)
Groos démontre qu'une mélodie nous fait l'impression essentielle d'une voix qui danse ; c'est un mouvement dans l'espace traduit en son. (Groos. Spiele der Menschen p. 33)
Nous verrons que l'action physiologique de la mélodie sur l'organisme est une action réflexe de celle que produit la danse elle-même et ressemble ainsi à celle produite par la vue d'un mouvement. 
La danse, la musique et la poésie étaient au début si intimement liées qu'on peut presque les dire identiques ; elles étaient encore inséparables chez les anciens Hellènes. 
Les refrains des ballades anglaises indiquent la part qu'y prend le danseur. L'emploi technique du mot "pied", pour compter les mesures, persiste toujours pour démontrer qu'un poème est au fond une danse.
Il paraît qu'Aristote a été le premier qui exprima l'idée que le rythme et les mélodies sont des mouvements, comme les actions sont des mouvements, et que, pour cette raison, ils sont des signes de sensation. 
« Toutes les mélodies sont des mouvements, dit Helmholtz. La rapidité gracieuse, la procession grave, la marche paisible, le saut désordonné, tous ces caractères différents du mouvement, et mille autres, peuvent être représentés par des successions d'intonations. Et comme la musique exprime ces mouvements, elle exprime aussi les conditions mentales qui évoquent naturellement des mouvements semblables soit du corps et de la voix, soit du principe même de la pensée et du sentiment » (Helmholtz. On the sensation of Tone, trad. anglaise par A. J. Ellis, 1885, p 250. )
D'un autre point de vue, le stimulus moteur de la musique a été affirmé par Cyples : « La musique se rapporte au sens qu'on peut parfaitement manipuler. Son charme émotionnel a frappé l'homme comme un grand mystère. Il semble qu'il ne soit nullement douteux que la musique dérive tous ses effets merveilleux, en plus de ce qu'elle plaît à l'oreille, de ses appels multiples à l'activité efférente, qui par ses appels vagues est agitée continuellement avec une inconséquence faiblement tumultueuse. De cette manière, la musique éveille au hasard, mais splendidement, la potentialité pure, encore non accomplie, qui est en nous.»
L'élément fondamental du mouvement transformé en musique a été bien démontré par Goblot (Goblot, La Musique descriptive, La Revue Philosophique, juillet 1901.) : « Chantée ou jouée, la mélodie figure à l'oreille un dessin successif, une arabesque qui se meut. 
On dit : monter et descendre une gamme : on appelle les sons hauts ou bas : la voix de femme la plus aiguë s'appelle soprano, ou dessus ; la voix la plus grave de l'homme s'appelle basse. Les sons graves ont été ainsi nommés par les Grecs parce qu'ils paraissent lourds et tendent vers le bas. 
Il semble que les sons soient soumis à l'action de la pesanteur, que les uns s'élèvent et que les autres tombent. 
Baudelaire en parlant du prélude de Lohengrin, remarque : "Je me sentis délivré du poids." 
Lorsque Wagner voulut figurer, dans les plus hautes régions des espaces célestes, l'apparition des anges qui apportent à la terre le Saint Graal, il fit usage de notes suraiguës et d'une sorte de choeur, joué exclusivement par les violons, divisés en huit parties, dans les plus hautes notes de leur registre. La descente sur la terre du chpeur céleste est rendue par des notes de plus en plus graves, comme la disparition progressive de ces notes graves représente sa réascension vers les régions éthérées.
« C'est un fait que les sons semblent s'élever et tomber. Il est difficile d'expliquer ce fait. Certaines personnes y ont vu une habitude dérivée de la notation coutumière suivant laquelle la hauteur d'une note correspond à sa hauteur sur la barre. Mais l'impression est trop profonde et trop générale pour l'expliquer par une cause si superficielle et si récente. On a aussi prétendu que les notes hautes sont généralement produites par des corps petits et légers, les notes basses par des corps lourds. Mais ce n'est pas toujours vrai. On a dit encore que dans la nature les notes hautes sont ordinairement produites par des objets placés à une certaine hauteur, tandis que les notes basses sortent des caves et des régions placées en bas. Mais on entend le tonnerre dans les nuages et le murmure d'un ruisseau ou le chant d'un grillon viennent de la terre. On a dit que, dans la voix humaine, les notes basses semblent résonner dans la poitrine et les notes hautes dans la tête. Tout cela est insuffisant. Nous ne pouvons expliquer par de telles analogies grossières une impression qui est très précise, et qui est plus sensible (ce fait à son importance) pour l'intervalle d'un demi accord que pour l'intervalle d'une octave. Il est probable qu'il faut chercher l'explication véritable dans la connexion. encore très peu comprise entre les éléments de notre appareil nerveux.
« Presque toutes nos émotions ont une tendance à produire du mouvement (Le terme même d'émotion implique par son éthymologie la « sortie de soi-même » (mouvement hors de...) (N. D. É)). 
Mais l'éducation nous rend économes de nos actions. La plupart de ces mouvements sont réprimés, surtout chez l'homme adulte et civilisé, parce qu'ils sont pour lui nuisibles, dangereux ou simplement inutiles, sans rapport avec le monde extérieur, alors que la motricité se traduit dans des actions visant à modifier le monde extérieur.» 
(Cf. la théorie psychanalytique des affects, par exemple dans Freud, Inhibition, Symptôme et Angoisse, Paris, P. U. F., 1951, et dans Rapaport D., On the psychoanalytic theory of affects in Int. J. Psychogical., 1953, 34, p177-198. « L'affectivité, écrit Freud en 1915 se manifeste essentiellement par des modifications corporelles (sécrétoires, circulatoires)
(-The Unconsciencious, in Collected Papers IV, p 98-136, London, Hogart Press, 1953 - Les affects sont donc conçus par Freud comme des phénomènes de décharge, ayant un aspect physiologique et un aspect psychologique, le sentiment. Et Rapaport (op. cit.) exprime plus récemment une opinion analogue en définissant les émotions comme « des manifestations à la fois physiologiques et psychologiques, l'un de ces deux aspects pouvant devenir le plus évident, au point même que l'autre peut ne pas apparaître du tout » (N. D. É.)).
Certains de ces mouvements ne sont pas achevés d'autres sont réduits à une faible excitation qui, extérieurement, est à peine perceptible. Il en reste assez pour constituer tout ce qui est expressif dans nos gestes, notre physionomie et nos attitudes. Les intervalles mélodiques possèdent à un haut degré la propriété de provoquer des impulsions à des mouvements, qui, même réprimés, laissent derrière eux des sensations internes et des images motrices. Il serait possible d'étudier ces faits d'une manière expérimentale, si nous avions à notre disposition un être humain qui, tout en conservant ses sensations et leurs réactions motrices, serait, par des circonstances spéciales, rendu entièrement spontané comme un automate sensible, dont les mouvements ne seraient ni produits avec intention, ni réprimés avec intention. De cette manière, les intervalles mélodiques chez un sujet hypnotisé pourraient être très instructifs.»
Des expériences comme celles désirées par Goblot ont déjà été faites par A. de Rochas et décrites dans un livre illustré à profusion par des photographies instantanées (A. de Rochas, Les Sentiments, la Musique et le Geste, 1900, chap III.)
Les expériences de Rochas ont été faites sur un sujet unique, Lina, autrefois modèle. Lina fut placée dans une condition de faible hypnose, puis on joua plusieurs fragments très simples de musique : des récitatifs, des airs populaires, et surtout des danses nationales, souvent de pays très éloignés. Les gestes de Lina étaient excessivement marqués et variés, en rapport avec le caractère de la musique. On découvrit qu'elle imitait souvent avec une précision étonnante les gestes véritables de danses qu'elle n avait jamais pu voir. La même musique évoquait toujours les mêmes gestes, comme il fut démontré par les instantanés. On assure que Lina était une jeune fille chaste et de bonne conduite, et elle ne présenta jamais les indications d'une émotion sexuelle définie sous l'influence d'aucune sorte de musique. Dans le même livre il y a des informations sur d'autres expériences hypnotiques avec de la musique. Ces dernières expériences furent, elles aussi, négatives par rapport aux phénomènes sexuels spécifiques.
Il faut ajouter qu'une note musicale est effective, comme stimulus physiologique, en dehors du rythme. Cela est démontré par les expériences de Féré avec le dynamomètre et l'ergographe (Féré. Sensation et Mouvement, chap V ; ed. Travail et Plaisir, chap. XII). 
Mais c'est l'influence de la musique sur le travail musculaire qu'on a le plus souvent étudiée, et autant sur les effort brefs avec le dynanomètre que sur du travail prolongé avec l'ergographe ; on a trouvé que la musique exerce une influence stimulante. 
Scripture a découvert qu'il développait entre le pouce et l'index, en s'exerçant sur un dynamomètre une force maximum de 8 livres ; mais ce chiffre s'élevait à 8 livres 3/4 lorsqu'on jouait le motif du géant de L'Or du Rhin, de Wagner (Scripture, Thinking, Feeling, Doing, p. 85.)
Tarchanoff a découvert avec l'ergographe que la musique vive cause temporairement la disparition de la fatigue chez les personnes nerveusement sensibles, mais la musique lente, avec une clef mineure, produit l'effet contraire (Tarchanoff, Influence de la musique sur l'homme et sur les animaux. Atti dell'XI Congresso Medico Internazionale Rome, 1894, t. Il, p. 158.)
Féré a étudié par l'ergographe l'influence variable de plusieurs intervalles musicaux sur le travail. Il y eut dans les résultats intéressants de cette étude un degré considérable de constance. Les discordances étaient déprimantes de même que la plupart des clefs majeures, mais non pas toutes. Dans des conditions de fatigue, par contre, les clefs mineures étaient plus stimulantes que les clefs majeures : résultat intéressant qui s'accorde avec l'influence stimulante de plusieurs émotions douloureuses, dans des conditions de fatigue organique, que nous avons notées déjà en étudiant le sadisme (cf L'impulsion sexuelle).
Féré remarque : « Notre éducation musicale ne fait que rendre plus perceptibles pour nous les rapports insconscients qui existent entre l'art musical et nos organismes. Ceux que nous considérons comme plus doués sous ce rapport ont accompli intérieurement une pénétration plus profonde des phénomènes, ils ressentent plus profondément les réactions entre l'organisme et les principes de l'art musical, ils éprouvent plus fortement que l'art est en eux.
(Féré, Travall et Plaisir, chap. XII, Action physiologique des sens musicaux. - Goblot, Revue philosophique, juillet 1901, p, 61, remarque : « Un traité pratique sur l'harmonie devrait nous dire de quelle manière tel intervalle, ou telle succession d'intervalles, nous affecte. Un traité théorique devrait nous donner l'explication de ces impressions. En un mot, l'harmonie musicale est une science psychologique.» Il ajoute que cette science est loin d'être construite)
Les processus musculaires supérieurs, comme les processus musculaires inférieurs, les processus volontaires comme les processus involontaires sont également stimulés par la musique. 
Darlington et Talbot ont découvert, au Laboratoire de Titchener, à l'Université Cornell que l'estimation des poids relatifs était favorisée par la musique (American Journal of Psychology, avril 1898)
En étudiant les variations du mouvement du genou, Lombard a trouvé que les processus réflexes involontaires sont toujours renforcés par la musique. Une musique militaire jouant une marche très vive causa l'augmentation du réflexe du genou aux passages retentissants et sa diminution aux passages doux, tout en demeurant tout le temps au-dessus du niveau normal 
(Arn. Journ. of. Psych., novembre 1887. - L'influence du rythme sur le système musculaire involontaire est indiquée par l'effet occasionnel de la musique quand elle produit une tendance à la contraction de la vessie (N. D. A.).).
À côté de cette influence stimulante du rythme et de la musique sur le système neuro-musculaire ; influence qui est ou n'est pas directe ; il y a une influence concomitante sur l'appareil circulatoire et respiratoire. Dans ces dernières années, on a fait un grand nombre d'expériences sur l'homme et sur les animaux pour déterminer l'influence de la musique sur le coeur et sur la respiration. 
Les premières de ces recherches ont été peut-être celles du physiologiste russe Dogiel, en 1880 (Archiv fur Anatomie und Physiologie, Physiologische Abteilung, 1880, p. 420.). Ses méthodes étaient peut-être insuffisantes, et ses résultats, en tout cas en ce qui concerne l'homme, incertains, mais chez les animaux la force et la rapidité du cÏur furent visiblement augmentées. 
Des recherches ultérieures ont démontré très clairement l'influence de la musique sur les systèmes circulatoire et respiratoire autant de l'homme que des animaux. 
Patrizi a fait des observations sur un jeune homme qui avait reçu une blessure grave à la tête, par laquelle une grande portion de la paroi du crâne avait été enlevée. Le stimulus d'une mélodie causa une augmentation immédiate de l'afflux du sang dans le cerveau. De cette observation il semble ressortir que la musique a une influence directe sur la circulation du sang dans le cerveau.
(M. L. Patrizi, Primi experimenti intorno all'influenza della musica sulla circolazione del sangue nel cervello umano, Intern. Congress fur Psychologie, Munich, 1897, p. 176)
Vers la même époque, Mentz a étudié la question en Allemagne (Philosophishe Studient. t.I). En observant la pulsation avec un sphygmographe et un tambour de Marey, il découvrit des preuves évidentes d'un effet sur le coeur. Lorsque l'attention était dirigée sur la musique, la pulsation s'accélérait ; en l'absence d'attention, la pulsation se ralentissait. Mentz découvrit aussi que des sensations agréables ont une tendance à ralentir la pulsation, tandis que des sensations désagréables ont une tendance à l'accélérer.
Binet et Courtier ont effectué une série élaborée d'expériences concernant l'action de la musique sur la respiration (avec le pneumographe double), sur le coeur et sur la circulation capillaire (avec le pléthysmographe de Hallion et Comte), sur un seul sujet, un homme très sensible à la musique et lui-même musicien cultivé. Des sons musicaux simples, sans élément émotionnel, accéléraient la respiration sans modifier sa régularité ou son amplitude. 
Des fragments musicaux, le plus souvent chantés, ordinairement bien connus du sujet et sans effet émotionnel sur lui, produisirent une irrégularité respiratoire, soit en amplitude, soit en rapidité, dans deux tiers des essais. La musique excitante, comme les marches militaires. accélérait plus la respiration que ne le faisaient des mélodies tristes, mais l'intensité de l'excitation fut en effet au moins aussi grande que sa qualité, car des excitations intenses produisaient toujours une respiration d'autant plus accélérée qu'elle était plus profonde. Le coeur était accéléré en harmonie avec la respiration plus rapide. Ni la respiration ni le coeur ne furent jamais ralentis. 
Quant à la pulsation capillaire, une influence fut constatée surtout, sinon exclusivement, par des mélodies gaies et excitantes, qui produisaient un rétrécissement. Au cours des expériences on découvrit que les effets physiologiques les plus accentués étaient exercés par les pièces dont le sujet considérait l'influence sur lui comme la plus émotionnelle. (Binet et Courtier, La Vie émotionnelle, Année Psychologique, 3° année, 1897, pp. 104-125. )
Guibaud a étudié la question sur plusieurs sujets. Il a confirmé et étendu les conclusions de Binet et Courtier. Il trouva que les réactions de différents individus variaient, mais que les réactions étaient constantes pour un même individu. La réaction circulatoire se manifestait plus souvent que la réaction respiratoire. Cette dernière pouvait être soit une modification simultanée de profondeur et de rapidité, soit de l'une de ces deux. La réaction circulatoire était une vasoconstriction périphérique, avec une plénitude diminuée de la pulsation et une faible accélération du rythme cardiaque. Il n'y avait jamais aucun ralentissement du coeur sous l'influence de la musique. 
Guibaud remarque que, lorsque les gens disent ressentir un frisson à certain passage de musique, cette sensation de froid trouve son explication dans la production d'une vasoconstriction périphérique, qu'on peut enregistrer par le pléthysmographe. 
(Guibaud Contribution à l'étude expérimentale de l'influence de la musique sur la circulation et la respiration. Thèse de Bordeaux, 1898. Résumé dans L'Année psychologique, 5° année, 1899, pp. 645-649.)
Dès que la musique affecte si directement et si puissamment les principaux processus vitaux, il n'est pas surprenant qu'elle doive indirectement influencer plusieurs viscères et fonctions. 
Tarchanoff et d'autres ont démontré que la musique affecte la peau, en augmentant la transpiration; qu'elle peut produire une tendance à verser des larmes ; qu'elle produit parfois le désir d'uriner ou même l'urination, comme dans le cas, rapporté par Scaliger, d'un Gascon, qui était toujours affecté de la sorte lorsqu'il entendait la cornemuse.
Tarchanoff et Wartanoff ont démontré que, chez les chiens, la stimulation auditive augmente la consommation d'oxygène de 20 % et l'élimination d'acide carbonique de 17 %.
En plus des effets du son musical déjà mentionnés, il a été démontré par Epstein, de Berne , que les autres sens sont stimulés sous l'influence du son, et qu'il y a notamment augmentation de la finesse de la vue, ce qu'on peut prouver par l'expérience. ( Congrès International de Physiologie, Berne, 1895.)
Il est probable que cet effet de la musique d'augmenter les impressions reçues par les autres sens a une importance considérable de notre point de vue actuel. "Pourquoi les sons musicaux sont-ils agréables dans un certain ordre et un certain rythme ?" demande Darwin dans La Descendance de l'Homme, et il conclut que la question est insoluble. 
Mais nous voyons que, quelle que soit la réponse finale, la raison immédiate est tout à fait simple. Le plaisir est une condition de stimulation faible et diffuse, où le coeur et la respiration sont un peu excités ; le système neuro-musculaire recoit une excitation additionnelle, les viscères sont un peu excités, l'activité de la peau est augmentée ; et certaines notes, certains intervalles musicaux agissent comme un stimulus physiologique pour produire ces effets.
(L'influence de l'association ne joue pas de rôle nécessaire dans ces influences agréables, car les expérimentations de Féré démontrent qu'un sujet non musical réagit physiologiquement, avec précision, aux intervalles musicaux qu'il est incapable de reconnaitre. &emdash; M. Mac Dougall trouve aussi que la qualité effective des séries rythmiques ne semble pas dépendre des associations secondaires, Psychological Review, janvier 1903 (N. D. A.)).
Il semble que cette action physiologique se marque chez toutes sortes d'animaux, à commencer par les insectes. Pour presque tous les animaux, il y a des sons agréables et attrayants et d'autres qui sont indifférents et désagréables. Il paraît que des insectes de genres très différents apprécient fort le chant des cigales (R- T. Lewis, dans Nature Notes, août 1891.). 
Les oiseaux s'intéressent beaucoup au chant agréable des autres, même si ceux-ci appartiennent à une autre espèce. Des expériences sur des animaux de toutes sortes, dans les jardins zoologiques, ont prouvé qu'aucun animal, excepté le phoque, n'était complètement indifférent à la musique, et que tous étaient désagréablement touchés par des discordances. Plusieurs animaux ont fait preuve de préférences et d'antipathies très marquées ; ainsi un tigre, qui était visiblement charmé par le violon, devenait furieux en entendant le piccolo. La plupart des animaux préféraient le violon et la flûte (Cornish, Orpheas at the Zoo, Life at the Zoo, p 115-13).
La plupart des gens ont probablement eu l'occasion d'observer la sensibilité des chiens à la musique. Une seule observation personnelle devra suffire ici. Un chien, que je connais très bien, gémissait et hurlait en entendant un nocturne de Chopin, surtout aux passages les plus pathétiques, et une ou deux fois il saisit et émit exactement la note qui fut jouée. Il haletait, se promenait anxieusement dans la chambre, et de temps en temps il mettait sa tête sur les genoux de la personne qui jouait. Lorsqu'on passa à une pièce plus joyeuse de Grieg, le chien devint immédiatement indifférent. il s'assit, bâilla. se gratta. Mais aussitôt qu'on en revint au nocturne, le chien répéta son accompagnement.
Il n'est nullement douteux que chez un grand nombre d'animaux de toutes les classes et plus spécialement chez les insectes et les oiseaux, l'attraction pour la musique est favorisée et développée sur la base de l'attraction sexuelle. Les notes musicales émises servent alors d'attrait sexuel pour le sexe opposé. 
Darwin a étudié soigneusement les témoignages sur ce point ( La Descendance de l'homme, chap. XIII et XIV.). On les a mis en doute, certains auteurs préférant adopter l'opinion d'Herbert Spencer que le chant des oiseaux provient « d'excès d'énergie » et que le rapport entre la courtisation et le chant n'est qu'un « rapport par concomittance.(The Origine of music (1857), Essays, t II.) » 
Cette opinion n'est plus défendable ; quelle que soit l'origine précise des notes musicales des animaux, et il n'est pas nécessaire de supposer que l'attraction sexuelle ait joué un grand rôle dans leur premier début rudimentaire, il y a peu de doute que les sons musicaux, et chez les oiseaux le chant, ne jouent un très grand rôle pour rapprocher le mâle et la femelle l'un de l'autre. 
(Celui qui a des doutes sur ce sujet peut consulter pour le chant des oiseaux, le petit livre où Hacker a très bien résumé les témoignages, Der Gesang der Vogel, ou l'examen détaillé des faits chez Groos, Spiele der Tiere, pp. 274 sq., éd. franc. Dirr et Van Gennep, Paris, F. Alcan (N. D. A.)
Il paraît que c'est ordinairement l'activité du mâle qui attire la femelle. Ce n'est que chez des musiciens très simples et très primitifs, comme certains insectes, que la femelle attire ainsi le mâle.
(Ainsi les moustiques sont irrésistiblement attirés par la musique et surtout par les sons musicaux qui ressemblent au bourdonnement de la femelle. Les mâles seuls sont ainsi tirés. Nuttall et Shipley et Sir Hiram Maxim, cités dans Nature, 31 octobre 1901, p. 655, et dans Lancet, 22 février 1902 (N. D, A.).). 
Le fait que presque toujours un seul sexe est doué musicalement devrait déjà suffire pour qu'on se méfie de toute autre solution du problème du chant animal que la solution sexuelle.
C'est néanmoins un fait excessivement remarquable que, malgré la grande influence de la musique sur les insectes et sur les vertébrés inférieurs, et malgré la grande influence émotionnelle et esthétique de la musique sur les mammifères et, d'une manière prédominante, sur l'homme, pourtant ni chez l'homme ni chez aucun des mammifères supérieurs on n'ait découvert que la musique exerce une influence sexuelle prédominante, ou même, dans la plupart des cas, une influence quelconque. 
Darwin, lorsqu'il fixe l'attention sur le fait que les mâles de la plupart des espèces de mammifères emploient leurs facultés vocales surtout et parfois exclusivement, dans la saison de l'accouplement, ajoute que c'est un fait surprenant que nous n'ayons encore aucun témoignage prouvant que ces organes sont employés par les mammifères mâles pour charmer les femelles 
(La Descendance de l'homme, 2° éd. anglaise, p. 567. &emdash; Groos, Spiele der Menschen, p. 22, en traitant de la musique, doute aussi que l'ouïe joue un rôle considérable dans la courtisation des mammifères (N. D. A.))
D'un point de vue très différent Féré, en étudiant la pathologie de l'instinct sexuel humain à la lumière d'une connaissance très complète des faits accessibles, affirme qu'il ne connaît pas d'observations détaillées qui démontrent l'existence de perversions sexuelles morbides basées sur le sens de l'ouïe, soit par rapport à la voix humaine, soit par rapport à la musique instrumentale (Féré, L'Instinct sexuel, 2 éd., p. 137).
Mais lorsque nous nous rendons compte que, non seulement chez les animaux les plus proches de l'homme, mais chez l'homme lui-même, le larynx et la voix subissent une différenciation sexuelle marquée à l'époque de la puberté, il est difficile de nier que ce changement ait une influence sur la sélection et la psychologie sexuelles. 
À l'époque de la puberté, il y a une faible hyperémie du larynx, accompagnée d'un développement rapide autant du larynx lui-même que des cordes vocales, qui deviennent plus grandes et plus épaisses, tandis qu'il se produit un changement correspondant de la voix, qui devient plus profonde. Tous ces changements sont très faibles chez les filles, mais très prononcés chez les garcons, dont on dit que les voix "muent" ; elles baissent au moins d'une octave. Le larynx féminin n'augmente à l'époque de la puberté que dans la proportion de 5 à 7, mais le larynx masculin dans la proportion de 5 à 10.
Le rapport direct de ce changement avec le développement sexuel général est démontré non seulement par le fait qu'il a lieu à l'époque de la puberté, mais aussi par le fait que, chez les eunuques, si les testicules ont été enlevés avant la puberté, la voix conserve son timbre enfantin. 
(Voir Biérent. La Puberté chap. IV; Havelock Ellis Man and Woman 4° éd., pp. 270-272. - Endriss Die bisherigen Beobachtungen von physiologischen und pathologischen und pathologischen Beziechungen der oberen Lufwege zu den Sexualorganen, part. III, réunit plusieurs observations sur les relations normales et anormales entre le larynx et la sphère sexuelle)
Je crois que nous pouvons décidément attacher un degré considérable d'importance à la voix et à la musique comme moyen d'attraction sexuelle. Sur ce point je suis d'accord avec Moll, qui remarque que « le sens de l'ouïe joue ici un rôle important et que la stimulation reçue par les oreilles est beaucoup plus grande qu'on ne le pense ordinairement.(Moll, Untersuchung uber die Libido sexualis tome I, p 133.)» 
Mais je ne crois pas que cette influence soit profonde dans son action sur les hommes, bien que Mantegazza dise, sans doute avec quelque raison, qu'on « ne peut pas entendre impunément la voix de certaines femmes ». Il est vrai que les Anciens ont honni l'influence sexuelle, ou en tout cas l'influence amollissante, de certaines sortes de musique, mais il semble qu'ils les aient regardées comme sédatives plutôt que comme stimulantes ; la sorte de musique qu'ils approuvaient comme étant d'un caractère martial et stimulant était celle qui montrait la plus grande tendance à produire des effets sexuels sur des personnes prédisposées.
Les Chinois et les Grecs ont insisté plus spécialement sur les qualités éthiques de la musique et sur ses effets moralisants et démoralisants. On affirme qu'un empereur chinois, il y a trente siècles, croyait que ceux-là seulement qui comprennent la musique sont capables de gouverner et qu'il distribuait les fonctions d'après cette croyance. Il agissait entièrement en harmonie avec la morale chinoise. Les textes du confucianisme  démontrent clairement que la musique et la cérémonie (ou le rituel social dans un sens large) sont regardées comme les deux influences conductrices principales de la vie : la musique était le guide interne, la cérémonie était le guide externe ; et la musique était considérée comme la plus importante des deux. (Voir les traductions de la série Sacred Books of the East.)
Chez les Grecs, Ménandre dit que, pour beaucoup de gens, la musique est un stimulus puissant à l'amour. 
Platon examine, dans le troisième livre de sa République, quelles sortes de musique devraient être encouragées dans sa société idéale. Il n'affirme pas clairement que la musique soit jamais un stimulus sexuel, mais il semble associer la musique plaintive (un mélange de musique lydienne et hypolydienne) avec l'ivrognerie, la mollesse et la paresse. Il considère que pareille musique est  "inutile même aux femmes, pour ne pas même parler des hommes". Il n'admet que deux sortes de musique : l'une violente et appropriée à la guerre, l'autre tranquille et s'adaptant à la prière ou à la persuasion. 
Il expose les qualités éthiques de la musique avec une profondeur qui approche presque de celle du philosophe chinois : « Pour ces motifs, nous attachons une importance pareille à une éducation musicale. car le rythme et l'harmonie pénètrent aux plus grandes profondeurs de l'âme, et la saisissent de la manière la plus puissante, apportant avec eux la grâce, et rendant un homme plein de grâce s'il est proprement instruit, l'amenant à louer des objets ravissants, et à les recevoir volontiers dans son âme, et à s'en nourrir, et à devenir noble et bon. » Mais Platon n'est pourtant pas aussi logique que le moraliste chinois, car, après avoir ainsi affirmé que c'est l'influence de la musique qui moule l'âme dans la vertu, il détruit son propre argument en ajoutant que « nous ne deviendrons jamais véritablement musicaux avant de connaître les formes essentielles de la tempérance, du courage, de la libéralité et de la munificence ». Il tourne donc dans un cercle. Il faut ajouter que la conception grecque de la musique était très vaste et impliquait la poésie.
Aristote avait une opinion plus large de la musique que Platon et il admettait pour elle une plus grande variété d'usages. Il s'appliquait moins à exclure les usages qui n'étaient pas purement éthiques. Il désapprouvait l'harmonie phrygienne, comme étant l'expression de l'excitation bachique. Mais il acceptait la fonction de la musique comme une (mot en grec) de l'émotion, notion dont on a cherché l'origine chez les Pythagoriciens 
(Pour l'examen des idées d'Aristote sur la musique, voir W.-L. Newman, The Politics of Aristotles, t. I, pp. 359- 369 ; Katharsis, purification rite ou action purificatoire (N. D. A.)). Dans de fréquentes allusions à la musique, Athénée lui attribue plusieurs propriétés intellectuelles et affectives, et en un endroit il parle des « mélodies qui incitent à une indulgence déréglée » (Liv. XIII, chap. LXXV; liv. XIV, chap.XXV.)
Nous pouvons conclure des Priapeia (XXVI) que les cymbales et les castagnettes formaient, dans l'Antiquité, l'accompagnement spécial des danses et des chansons libertines : Cymbala cum crotalis, pruriginis arma.
La croyance ancienne à l'influence moralisatrice de la musique a survécu dans les temps modernes, surtout sous une forme un peu plus scientifique, comme croyance dans ses effets thérapeutiques sur des conditions de désordres nerveux et mentaux. 
C'est aussi une croyance ancienne, comme le montre l'exemple bien connu de David qui joue devant Saul afin de dissiper sa mélancolie. 
En 1729, un pharmacien d'Oakham, Richard Broune, publia un ouvrage sous le titre de Medicina Musica, où il voulut démontrer que la musique est utile contre plusieurs maladies. 
Plus récemment, on a décrit plusieurs expériences et plusieurs cas qui montrent l'efficacité de la musique sous certaines conditions spéciales. 
Un médecin américain, W.-F. Hutchinson, a prouvé qu'on peut produire I'anesthésie au moyen de diapasons construits avec précision et qui ont des degrés de vibration déterminés (Résumé dans British medical journal, Paris, septembre 1 898)
Ferrand donne les raisons pour lesquelles il propose de classer certaines sortes de musique comme des antispasmodiques puissants avec une action thérapeutique utile (Académie de Médecine, Paris, septembre 1895). On a aussi décrit le cas d'un enfant chez lequel des terreurs nocturnes furent soulagées par de la musique calmante en ton mineur. 
La valeur de la musique dans les asiles d'aliénés est bien reconnue (Nacke, Revue de psychiatrie, octobre 1897). Vaschide et Vurpas ont décrit le cas d'une jeune fille de vingt ans, souffrant de confusion mentale avec excitation et déséquilibre moteur central, chez laquelle l'équilibre musculaire fut rétabli et les mouvements furent rendus plus coordonnés et plus proportionnés sous l'influence de la musique.(Vaschide et Vurpas, Comptes rendus de la Société de Biologie, 13 décembre 1902) Fotherby croit que la musique produit ses effets thérapeutiques utiles en causant un faible degré d'hypnose.(Foberthy, Anals of Psychical Science, juin-juillet 1908.)
Bien qu'il y ait eu beaucoup d'exagération dans la doctrine ancienne sur l'influence de la musique, ses effets réels sont néanmoins considérables. Cela n'est pas seulement prouvé par les expériences déjà analysées plus haut, qui montrent l'efficacité des sons musicaux comme stimuli physiologiques, mais la même conclusion ressort aussi de considérations anatomiques. 
Mac Kendrick a démontré que les racines des nerfs auditifs sont probablement distribuées sur une plus grande étendue et qu'elles ont des connexions plus larges que celles d'aucun autre nerf. On n'a pas encore complètement démêlé les connexions compliquées de ces nerfs. Cela suggère une explication sur la manière dont la musique pénètre jusqu'au plus profond de notre être et exerce son influence, par des voies adjointes, des mécanismes réflexes, tant cérébraux que somatiques, ce qui fait qu'il reste à peine une fonction du corps qui ne puisse être affectée par les pulsations rythmiques, par les progressions mélodiques et par les combinaisons harmoniques des sons musicaux (Nature, 15 juin 1899, p. 164.).
L'ancienne croyance de l'influence de la musique sur la morale ou la croyance moderne de son influence thérapeutique ne peuvent pas nous autoriser à affirmer que la musique ait une influence marquée pour exciter spécialement les instincts sexuels. Même le fait qu'on est parfois allé jusqu'à conseiller l'emploi de la musique contre l'impuissance ne nous donne pas de droits à cette affirmation(Roger, Traité des effets de la musique, 1803, p. 234 ct 342.) 
De même nous ne pourrons baser une telle argumentation sur le fait que la musique est souvent associée avec les sentiments amoureux de la jeunesse. Des hommes affirment souvent qu'il y eut des rapports entre leurs premières idées d'amour et des femmes qui chantent ou qui jouent de la musique. Mais. dans ces cas, on trouvera toujours que la fascination était romanesque et sentimentale, et non spécifiquement érotique. 
(Un exemple typique se présente au début de la première Histoire dans I'Appendice B du volume consacré à l'étude de L'impulsion sexuelle (N. D. A.). )
Dans la vie adulte, la musique qui nous paraît le plus nettement de tendance sexuelle (comme une grande partie du Tristan de Wagner) produit souvent en réalité cet effet partiellement par l'association avec la légende, et partiellement parce que l'intelligence s'imagine l'effort du compositeur à traduire la passion par des expressions esthétiques. L'effet de la musique elle-même n'est pas sexuel. On peut très bien admettre que les résultats des expériences concernant l'influence de la musique de Tristan sur des hommes hypnotisés aient été négatifs, comme on l'a affirmé. 
Helmholtz va même jusqu'à dire que l'expression par la musique du désir sexuel est identique à celle du désir religieux.
Il est aussi très vrai qu'une voix douce et tendre est pour tout homme normal, comme pour Lear, « une chose excellente chez une femme », et qu'une voix dure ou aiguë peut amoindrir ou même détruire entièrement l'attraction d'un beau visage. Mais ordinairement la voix n'est pas en elle-même une méthode adéquate ou puissante pour évoquer l'émotion sexuelle chez un homme. 
Même dans ses manifestations vocales les plus belles, la fascination sexuelle exercée par une grande cantatrice, tout en étant considérable, n'est pas comparable à celle qui est communément exercée par une actrice.
On a décrit des cas, qui se présentaient sans doute le plus souvent chez des hommes d'une disposition nerveuse quelque peu morbide, où l'attraction sexuelle était exercée surtout par l'oreille, ou dans lesquels il y avait une sensibilité sexuelle spéciale pour des inflexions ou des accents particuliers 
(Vaschide et Vurpas, Archives de Neurologie, mai 1904, constatent que, d'après leurs expériences, la musique peut faciliter l'approche sexuelle dans certains cas de satiété, et que, dans certains cas pathologiques, l'acte sexuel ne peut avoir lieu que sous l'influence de la musique (N. D. A.)). 
Féré cite le cas d'un jeune homme qui était dans un hôpital pour arthritisme aigu, et qui se plaignait d'érections douloureuses chaque fois qu'il entendait à travers la porte la voix très agréable d'une jeune femme (invisible pour lui) qui surveillait le linge (
Féré, L'instinct sexuel, p. 137. &emdash; Bloch, Beitrage, etc., t. II, p. 355, cite quelques remarques de Kistemaecker sur le bruit des vêtements féminins et sur la manière dont les femmes sauvages, et parfois les femmes civilisées cultivent ce frôlement. Gutzkow dit, dans son Autobiographie, que le froufrou des vêtements de femme était pour lui de la musique (N. D. A.)). 
Mais il semble que ces phénomènes ne soient pas très communs ou, en tout cas, pas très prononcés. Pour autant que valent mes propres recherches, une très petite proportion des hommes seulement éprouve des sensations sexuelles définies en écoutant de la musique. Le fait que, chez la femme, la voix est si peu différente de celle d'un enfant, ainsi que le fait très important que chez les ancêtres immédiats ou même chez les ancêtres éloignés de l'homme, la voix féminine n'a pu servir pour attirer le mâle que bien rarement, peuvent suffire pour expliquer le faible rôle joué par la voix et la musique comme attrait sexuel sur les hommes. 
(La voix est sans doute un facteur de premier ordre de l'attraction sexuelle chez les aveugles. Sur ce point je manque de faits. L'expression de la voix pour les aveugles et leurs sympathies et leurs antipathies basées sur des qualités vocales ressortent très bien d'une étude par James Cocke, un médecin américain qui, lui-même, fut aveugle dès sa première enfance : The Voice as an index to the soul, Arena janvier 1894.)
Chez les femmes, il en va autrement. On peut même dire dès le début que les mêmes raisons qui rendent improbable que les hommes soient sexuellement attirés par l'ouïe, rendent probable que les femmes le soient. Le changement dans la voix à l'époque de la puberté transforme la voix masculine plus profonde en un attribut sexuel secondaire très caractéristique de l'homme.
Chez les mammifères en général, c'est le mâle qui est le musicien et cela surtout, et parfois même exclusivement, à la saison de l'accouplement. Ce fait peut conduire à la supposition que chez les mammifères en général, y compris l'espèce humaine, il y a, chez la femelle, une sensibilité réelle ou latente pour la signification sexuelle de la voix du mâle. 
(Longtemps avant que Darwin eût avancé sa théorie de la sélection sexuelle, Laycock avait montré l'influence que la voix du mâle, chez l'homme et chez les autres animaux exerce sur la femelle, Nervous Diseases of women, p. 74 &emdash; Quelques années plus tard, l'auteur d'une étude intéressante, Women in her psychological relations Journal of psychological Medicine, 1851, remarque : « La voix sonore de l'homme a sur la femme une influence tout à fait analogue à celle du mugissement et du hennissement chez d'autres animaux. Cette voix aura, sur une constitution amoureuse ou sensible, un effet très semblable à celui de la couleur ou d'autres stimuli ovariens visuels » Cet auteur ajoute que l'influence devient encore plus importante, lorsque la voix a été modulée par la musique: « Sous ce rapport, l'homme a quelque chose de commun avec les insectes et avec les oiseaux. » (N. D. A.)) 
Dans les conditions de la civilisation humaine, cette sensibilité peut être transférée à la musique en général. Il convient d'observer que, dans des romans écrits par des femmes, il est fréquemment question des qualités de la voix du héros et de ses effets affectifs sur l'héroïne 
(Roos parle, en plusieurs endroits, du rôle important qui. dans les romans allemands écrits par des femmes, est joué par ce que l'une d'elles a appelé « la voix mâle barbue » (N. D. A.))
Nous pouvons aussi rappeler l'enthousiasme personnel spécial et particulier qui est éveillé chez des femmes par des musiciens populaires, enthousiasme plus prononcé que celui qu'éveillent chez les femmes les acteurs en vogue.
Comme exemple intéressant de l'importance attribuée par des romancières aux effets de la voix mâle, on peut citer The Mill on the Floss, de George Eliot, qui est probablement le roman le plus intime et le plus personnel qu'elle ait écrit. Au chapitre VI, l'influence de Stephen Guest, jeune homme quelque peu terre à terre, sur Maggie Tulliver est attribuée presque exclusivement à l'effet de sa voix de basse chantante. Nous sommes informés définitivement de la sensibilité de Maggie Tulliver « à l'excitation suprême de la musique ». Un certain jour, « toutes ses intentions furent perdues dans l'état vague d'émotion que produisit le duo inspirant une émotion qui paraissait la rendre forte et faible en même temps : forte pour toute jouissance, faible pour toute résistance. Pauvre Maggie ! elle semblait très belle, au moment où son âme était ainsi un jouet de la puissance inexorable du son. On eût vu le moindre tremblement perceptible à travers son corps tout entier, lorsqu'elle se pencha un peu en avant en joignant ses mains comme pour se retenir, tandis que ses yeux se dilataient et brillaient avec cette expression enfantine de joie étonnée qui revenait à chaque reprise de ses moments les plus heureux ». 
Les romans de George Eliot contiennent plusieurs allusions aux puissants effets émotionnels de la musique.
Il n'est pas nécessaire de résumer la Sonate à Kreurzer de Tolstoï, où la musique est regardée comme le Galeotto pour réunir les amants « le trait d'union de la musique, la sensualité la plus raffinée de tous les sens. »
Dans la courtisation humaine primitive, la musique joue très fréquemment un rôle considérable, mais ordinairement pas à elle seule, car elle sert généralement d'accompagnement au chant et à la danse des fêtes érotiques. 
Les Gilas du Nouveau-Mexique, chez lesquels la courtisation consiste en une sérénade prolongée jour après jour avec jeu de flûte, constituent un cas un peu exceptionnel. 
Les femmes des sauvages sont évidemment très attentives à la musique. Backhouse (Cité par Ling Roth, The Tasmanians, p. 20.) rapporte qu'une femme qui appartenait à la race très primitive et maintenant disparue des Tasmaniens, mise en présence d'une boîte à musique, « écoutait avec intensité ; ses oreilles se mouvaient comme celles d'un chien ou d'un cheval, pour saisir le son. »
J'ai trouvé peu de preuves qui démontrent que la musique exerce jamais, sauf dans des cas exceptionnels, la moindre influence sexuelle spécifique sur les hommes musicaux ou non. Mais j'ai beaucoup de preuves qu'elle exerce souvent cette influence, à un degré faible, mais défini, sur des femmes, et même sur des femmes parfaitement normales. En jugeant d'après mes propres enquêtes, il semble probable que la majorité des femmes normalement élevées sont capables d'éprouver un certain degré d'excitation sexuelle définie par la musique. Une femme constate par exemple que les orchestres en général ont une tendance à lui produire cet effet. Une autre trouve cette influence spécialement dans la musique de Wagner, une troisième dans la musique militaire. D'autres affirment simplement que la musique hausse leur état d'esprit, ce qui exprime probablement l'expérience de la plupart des personnes des deux sexes. Une dame mentionne que certaines de ses amies, dont les sentiments érotiques sont éveillés par la musique, sont spécialement affectées de cette manière par le chÏur d'une église catholique. 
(On trouve une allusion ancienne à l'influence sexuelle de la musique sur les femmes dans un passage enjoué de Swift, Memoirs of Martinus Scriblerus, liv. I, chap. VI (livre dû peut-être à Arbuthnot, le collaborateur médical de Swift) : « Ælien ne raconte-t-il pas que les juments de Libye étaient excitées à l'accouplement par la musique ? (Ce qui devrait être un avertissement aux femmes vertueuses de ne pas fréquenter les opéras). » Cette allusion se rapporte à Ælien. Hist. Animal., liv. XI, chap. XVIII, et liv. XII, chap. XLIV (N- D. A.)).
Dans les cas typiques que nous venons de mentionner, et qui concernent tous des femmes bien normales et saines, les effets sexuels de la musique étaient ordinairement très faibles tout en étant définis. Chez des sujets névropathiques, ces effets peuvent parfois être plus prononcés. Ainsi un correspondant médical m'a communiqué le cas d'une dame mariée, qui a un enfant. Cette femme est cultivée, très belle, mais aussi très névrosée. Elle est mariée à un homme avec lequel elle n'a rien de commun. Ses goûts sont dans la direction de la musique ; elle est une pianiste accomplie, et sa voix très exercée aurait fait sa fortune. Elle admet qu'elle a des sensations sexuelles prononcées, mais elle ne comprend pas pourquoi les rapports sexuels ne lui apportent jamais ce dont elle a conscience d'avoir besoin. Mais l'audition de belle musique ou parfois l'excitation de son propre chant, causent à l'occasion un orgasme intense.
Vaschide et Vurpas insistent sur les effets stimulants sexuels de la musique, mais ils ne racontent en détail qu'un seul cas, et il est sans doute important qu'il s'agisse là d'une femme : « Lorsqu'elle écoute un morceau de musique, son expression change, ses yeux deviennent brillants, les traits sont accentués, un sourire commence à se former, une expression de plaisir apparaît, le corps devient plus droit, il y a une hypertonicité musculaire générale. Elle nous dit qu'en écoutant la musique elle éprouve des sensations très semblables à celles du rapport sexuel normal. 
La différence concerne surtout l'appareil génital local, car il n'y a pas d'écoulement de mucosité vaginale. Du côté psychique, la ressemblance est frappante.» (Vaschide et Vurpas, Du coefficient sexuel de l'impulsion musicale, Archives de Neurologie, mai 1904. )  
Bien plus tôt les Goncourt avaient minutieusement décrit l'expression et l'attitude des femmes sous l'influence de la musique, et étaient arrivés à la conclusion que pour les femmes la musique est « la messe de l'amour. (Journal des Goncourt, t III, p. 19) »
Il est parfois dit ou sous-entendu qu'une femme (ou un homme) chante mieux sous l'influence de l'émotion sexuelle. Un auteur (Woman in her psychological relations, Journal of Psychological Medicine, 1851.) parle d'une jeune dame, remarquable pour ses talents musicaux et poétiques, qui naïvement répondit à un compliment sur son chant : « Je ne chante jamais aussi bien qu'après avoir fait l'amour. » 
George Eliot dit : « Il n'y a peut-être aucun sentiment, sauf les extrêmes de peur et de tristesse, qui fasse autant ou mieux chanter ou jouer un homme. » 
Il est donc admissible qu'un certain degré d'exaltation émotionnelle générale puisse exercer une influence favorable sur la voix chantée. Mais il est difficile de croire qu'une excitation physique définie. au moment de l'exercice de la voix ou immédiatement avant, puisse ordinairement avoir sur la qualité de cette voix autre chose qu'une influence pernicieuse. Il est reconnu que les ténors (dont la voix ressemble à celle des femmes plus que ne le font les basses, qui ne sont pas tenues à tant de circonspection) doivent observer des préceptes d'hygiène sexuelle. 
La menstruation a souvent une influence définie pour déranger la voix (Havelock Ellis, Man and Woman, 4e ed., p.90) . Comme le voisinage de la menstruation est aussi la période où l'excitation sexuelle peut le plus facilement être éprouvée, nous tenons ici une indication de plus que l'émotion sexuelle n'est pas favorable au chant. 
Je suis d'accord avec les remarques d'un correspondant, un musicien amateur, qui écrit :  "L'excitation sexuelle et le bon chant ne semblent pas aller ensemble. La capacité émotionnelle d'une femme, en chantant ou sur la scène, peut avoir des rapports lointains avec la névrose hystérique ; mais cette capacité pour l'art est mieux démontrée par l'absence d'influences sexuelles troublantes. Une femme peut certainement s'imaginer être l'héroïne d'un roman capricieux et elle peut se laisser aller un peu en chantant, avec des résultats meilleurs. Mais le souvenir d'ardeurs sexuelles n'aidera aucune femme à améliorer sa voix. Certaines femmes ne chantent bien que lorsqu'elles pensent aux autres femmes qu'elles veulent surpasser. Une jeune fille met son âme dans sa voix en pensant à certain gâteau, une autre en pensant à son amant (tout en n'ayant pas d'amant), et la plupart, sans doute, en ne pensant à rien du tout. Mais aucune femme ne trouvera en elle-même un sens artistique parce qu'elle est absorbée par un autre sens, même si elle s'y est livrée d'une manière parfaitement respectable'. 
La réalité de l'association entre l'impulsion sexuelle et la musique, et par suite l'art en général. est démontrée par le fait que l'évolution de la puberté a tendance à être accompagnée d'un intérêt très marqué pour la musique et pour d'autres arts. 
Lancaster a étudié ce problème chez un grand nombre de jeunes gens.(Si l'on se réfère à l'assimilation, indiquée au début de ce chapitre. de la musique à la danse, on doit aussi évoquer la fréquence de l'homosexualité latente ou vécue. chez les danseurs (N. D. É.)). Il ne mentionne pas la différence des sexes, mais la plupart de ses sujets étaient féminins. Il a découvert que 50 à 75 % des jeunes gens éprouvent une impulsion pour l'art au moment de la puberté et que cette impulsion dure quelques mois ou tout au plus un ou deux ans(Le lien entre pulsions homosexuelles et attirance pour l'art peut rendre compte de ce phénomène. On sait en effet la quasi constance des manifestations de bisexualité à l'adolescence. aussi bien chez le garçon que chez la fille (N. D. E.)). Il paraît que 464 jeunes gens firent preuve d'un goût accru et passionné pour la musique, contre 102 seulement qui n'éprouvèrent pas de changement sous ce rapport. La courbe culmine à l'âge de quinze ans et tombe rapidement après celui de seize ans. Plusieurs de ces sujets étaient en réalité absolument non musicaux. (E. Lancaster, Psychology of adolescence, Pedagogical Seminary, juillet 1897. )
Chapitre II
Résumé
- Pourquoi l'influence de la musique dans la sélection sexuelle humaine est relativement petite.
Nous avons vu qu'il est possible de réunir succinctement les faits jusqu'ici accessibles concernant l'influence sur l'impulsion sexuelle de stimuli agissant par l'oreille. Ces faits sont assez simples. Ils évoquent peu de problèmes obscurs demandant à être analysés ; ils ne nous présentent aucune perversion remarquable des sentiments. En même temps, les stimuli de l'excitation sexuelle reçus par le sens de l'ouïe sont un peu plus importants qu'on ne le croit communément, bien qu'ils n'exercent que rarement une influence exclusive ou prépondérante. 
D'abord la voix, ensuite la musique instrumentale, exercent un effet distinct dans cette direction, un effet qui représente une spécialisation de l'influence physiologique stimulante générale que tous les sons musicaux exercent sur l'organisme. Mais sous ce rapport il y a une différence définie entre les deux sexes. Il est relativement rare de trouver que la voix ou la musique instrumentale, quelque puissante que soit son influence émotionnelle générale, ait un effet sexuel spécifique sur les hommes. 
D'autre part, il est probable que la majorité des femmes, en tout cas chez les classes cultivées, sont susceptibles de démontrer un certain degré de sensibilité sexuelle pour la voix masculine ou pour la musique instrumentale. Il n'est pas surprenant de voir la musique éveiller l'émotion sexuelle, si nous nous rappelons que, chez la majorité des gens, le développement de la vie sexuelle est accompagné d'une période d'intérêt spécial pour la musique. Et l'on ne saurait s'étonner que les effets sexuels spécifiques de la voix et de la musique soient surtout éprouvés par les femmes, si nous songeons que non seulement dans l'espèce humaine c'est chez le mâle que le larynx et la voix subissent la plus grande modification à l'époque de la puberté, mais que chez les mammifères en général c'est le mâle qui est surtout ou exclusivement vocal à la période de l'activité sexuelle. 
Ainsi. la sensibilité sexuelle aux manifestations vocales doit se manifester surtout ou exclusivement chez les mammifères femelles. Bien que la sensibilité esthétique pour le son soit très développée, bien que la sensibilité affective pour le son soit très profonde et très répandue et que les femmes puissent être troublées par la voix masculine, bien que les hommes soient charmés par la voix féminine, on ne peut toutefois prétendre que, dans l'espèce humaine, l'audition soit un facteur puissant de l'accouplement. 
Ce sens est intermédiaire entre les sens inférieurs du toucher et de l'odorat d'un côté, avec leur appel vague et diffus, et le sens supérieur de la vision de l'autre côté, avec son appel excessivement spécialisé. 
L'importance du toucher comme sens primaire et fondamental est certaine. 
L'odorat n'a pas d'influence décisive sur l'attraction sexuelle chez les personnes normales. L'odorat agit en vertu des sympathies et des antipathies émotionnelles. Mais comme chez les ancêtres de l'homme l'odorat constituait le canal fondamental de la sensibilité sexuelle, ce sens fournit un réservoir latent d'impressions, auxquelles les personnes nerveusement anormales, et même les personnes normales sous l'influence d'excitations ou de la fatigue. sont toujours susceptibles de devenir sensibles. 
L'ouïe, sens destiné à recevoir des perceptions distantes. a chez l'homme un champ plus large que le toucher ou l'odorat. Mais là, l'ouïe rivalise avec la vision, qui constitue chez l'homme le sens suprême et dominant.
(Nietzsche, Morgenröthe, p. 230) a même supposé que chez l'homme primitif la délicatesse de l'ouïe et l'évolution de la musique ne peuvenl s'être produites que sous des conditions qui rendaient difflcile l'entrée en jeu de la vision : « L'oreille, l'organe de la peur, ne pouvait se développer comme il l'a été que dans la nuit et dans le crépuscule des forêts et des caves obscures... Dans la clarté, l'oreille est moins nécessaire. De là le caractère de la musique comme un art de nuit et de crépuscule.» (N. D. A.)). 
Nous sommes toujours plus affectés par ce que nous voyons que par ce que nous entendons. Rarement l'homme et la femme s'entendent sans bientôt se voir, et le foyer principal de l'intérêt est alors transmis aussitôt au centre visuel. 
(A un concert la plupart des gens s'efforcent par instinct de voir les exécutants ; on distrait ainsi l'impression purement musicale. Il est encore très rare qu'on mette en pratique la proposition raisonnable de GÏthe de rendre les exécutants invisibles (N. D. A.))

Dans la sélection sexuelle humaine, l'ouïe joue par conséquent un rôle qui est presque toujours subordonné à celui de la vision. 
(Le pouvoir séducteur de la voix mâle de certaines femelles sur certains hommes prédisposés, au cours de leur enfance, est cependant certain (N. D. É.)).
Éditique : Dr Lucien Mias  - 22 juin 2009
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