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toucher - appendice
A
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- Appendice
A
L'origine du baiser 6 pages
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Les notes de
bas de page ont
été incluses dans le texte.
-
NDA = note de
l'auteur, en 1935 ; NDÉ : note de l'éditeur, en
1964
- « Des manifestations
qui ressemblent au baiser,
soit dans le
but d'exprimer l'affection, soit dans celui d'exprimer
l'émotion sexuelle, se discernent dans toute la
série
animale, depuis les animaux inférieurs jusqu'à
l'homme.
- Lorsque des limaçons et certains insectes se caressent de
leurs antennes, pendant les rapports sexuels, cette action est de la
nature du baiser.
- Les oiseaux se servent de leur bec pour une sorte
de caresse. En parlant des guillemots et de leur habitude de se
mordre aux pattes l'un l'autre, et de l'intérêt
que le
mâle prend toujours à ce
procédé, qui
soulage probablement l'irritation causée par les insectes,
Edmond Selous remarque : « Lorsqu'ils se mordent et se
nettoient
les plumes mutuellement, je suppose qu'on est en droit de dire qu'ils
se choient et se caressent, l'expression et la pose de l'oiseau qui
subit ce traitement étant souvent
béates. »
- (
E. Selous, Bird Uwatching, 1901, p. 191. Cet auteur
ajoute: «Il semble, en effet, probable que l'obtention d'un
bénefice pratique pareil ait été
l'origine de la
caresse dans la nature tout entière.»(N. D.
A.)).
- Chez les
mammifères, par exemple chez le
chien, nous observons des actes qui ressemblent de près au
baiser. Le chien qui renifle, lèche et mord gentiment son
maître ou une chienne, combine la plupart des
activités
sensorielles impliquées dans les formes si
variées du
baiser humain.
- Le baiser pratiqué
par les hommes implique
surtout soit le
sens tactile, soit le sens olfactif. Parfois il implique à
quelque degré ces deux éléments
sensoriels
- (Tylor
appelle le baiser «la salutation par le
goût» et d'Enjoy le definit comme «une
morsure et une
succion». Mais il semble qu'il n'y ait pas de preuves que le
baiser contienne aucun élément gustatif au sens
strict
du mot).
- Le baiser tactile est sans
doute très ancien et
primitif.
Il est commun chez les mammifères en
général. Le
bébé humain possède, à un
degré
très marqué, I'impulsion de porter à
sa bouche,
de lécher et d'essayer de goûter toute chose.
Compayré a supposé que cela vient probablement
d'un
souvenir de l'action des lèvres qui s'efforcent de saisir le
mamelon maternel (Compayré,
L'Évolution
intellectuelle et morale de l'enfant, p. 9).
- Un enfant
affectueux, dit Mantegazza, n'applique pas seulement des objets
inanimés à ses lèvres ou à
sa langue,
mais il lèche de lui-même les personnes qu'il aime
(Mantegazza, Physiognomy and
Expression. p. 144).
- Stanley Hall, en examinant une grande quantité
d'informations
sur ce point, trouva que « certains enfants tiennent
à
lécher les joues, le cou, les mains des personnes qu'ils
désirent caresser », ou qu ils aiment à
se faire
lécher par des animaux.
- (Comme
on l'a vu,
c'est par la bouche que l'enfant entre d'abord, et pendant quelque
temps exclusivement, en contact avec le monde - d'où la
notion
freudienne de stade oral réceptif puis agressif, couvrant
approximativement la premiere année de la vie. On ne doit
donc
pas s'étonner que ce mode de relation demeure
préponderant chez certains peuples, même
à des
périodes ultérieures de l'existence (N. D.
É.)).
- On peut rapprocher cette
impulsion des enfants de
l'impulsion
maternelle des animaux à lécher leurs petits.
"La
méthode de lécher les petits,
pratiquée par la
mère, dit S.S. Buckman, serait cause que l'action de
lécher soit associée à des sensations
agréables. De plus, le frottement permet le soulagement de
l'irritation causée par les parasites et devient ainsi
agréable. Il est même possible que le
désir de la
mère de lécher ses petits ait
été produit
en premier lieu par le désir de procurer à sa
progéniture un plaisir qu'elle avait ressenti
elle-même" Il est donc possible de regarder
l'impulsion
d'un enfant à lécher comme une manifestation
éphémère d'une impulsion animale plus
fondamentale (Dans certaines parties du
monde,
l'impulsion persiste jusqu'à la vie adulte. Sir S. Baker,
Ismailia, p 472, rapporte qu'on lèche les yeux comme une
marque d'affection. (NDA)), manifestation qui est
susceptible
d'apparaître dans la vie adulte sous l'empire d'une forte
émotion sexuelle.
- Cette association est importante, s'il est
vrai, comme il y a lieu de le croire, que le baiser de l'amour sexuel
est à l'origine le développement du baiser plus
primitif que la mère donne à son enfant, car
parfois on
trouve que le baiser maternel est pratiqué là
où
le baiser sexuel est inconnu. L'impulsion à mordre forme
aussi
une partie de l'élément tactile qui se trouve
à
la base du baiser.
- Stanley Hall constate que les enfants aiment
à mordre, mais pas toujours comme une marque d'affection.
Mais
on peut constater dans l'action de mordre une origine distinctement
sexuelle, car chez beaucoup d'animaux les dents (et chez les oiseaux
le bec) servent au mâle pour saisir plus fermement la femelle
pendant les rapports sexuels.
- L'héroïne de
Penthesilea de
Kleist remarque que "le baiser (Kusse) rime avec la morsure
(Bisse), et celui qui aime de tout son cÏur peut facilement
confondre
les deux".
- Le baiser, tel qu'il existe en Europe, s'est
développé sur une base sensorielle, qui est
surtout
tactile, bien que parfois il puisse y coexister un
élément olfactif. Le baiser ainsi compris n'est
pas
très répandu et on ne le rencontre pas,
d'ordinaire,
chez les peuples rudes et non civilisés.
- Nous pouvons suivre
la trace du baiser dans l'antiquité aryenne et
sémitique mais non pas sous une forme précise.
Homère l'a à peine connu, et les
poètes grecs en
parlent rarement. De nos jours, on peut lire que le baiser est connu
partout en Europe, sauf en Laponie. Même en Europe, c'est
probablement une découverte relativement moderne ; et Rhys
affirme que dans aucune des langues celtiques il n'existe pas de
terme pour "baiser"; le mot dont on se sert est
toujours
dérivé du mot latin "pax" (W.
Moore et J. Rhys, Book of common player in Manx Gaelic,1895).
Mais, à une période historique assez
reculée,
les Celtes du Pays de Galles tout au moins ont appris à
connaître le baiser, mais il était
regardé comme
une chose sérieuse et on en usait avec modération
; la
loi ne permettait le baiser qu'en des occasions spéciales,
comme par exemple à l'occasion d'un jeu qui s'appelait le
jeu
des cordes, ou dans des festins ; une femme qui, en dehors de ces
occasions embrassait un homme autre que son mari pouvait être
répudiée.
- Dans toute l'Asie orientale, le baiser est inconnu. Dans la
littérature japonaise, les baisers n'ont pas de place. "Au Japon, le baiser est tout à fait inconnu comme
marque
d'affection, dit Lafcadio Hearn, si nous exceptons le seul fait que
les mères japonaises, comme les mères de tous les
pays,
embrassent et étreignent parfois leurs
bébés.
Après la première enfance, il n'y a plus
d'embrassement
ou de baiser ; ces actions sont considérées comme
inconvenantes, sauf dans le cas de bébés. Jamais
des
jeunes filles ne s'embrassent mutuellement ; jamais les parents
n'embrassent leurs enfants qui ont déjà appris
à
marcher (Les mères annamites
remplacent
actuellement le baiser à leur enfant en le respirant, comme
on
fait d'une fleur qui sent bon). Cela est vrai, a
été vrai toujours, pour toutes les classes ; la
poignée de main est tout aussi inconnue. Lorsque les
Japonais
se rencontrent après une longue absence, ils sourient,
peut-être ils crient un peu, il peut même arriver
qu'ils
se frappent, mais c'est tout. L'affection japonaise est
démontrée surtout par des actes de courtoisie et
d'amabilité exquises." (L.
Hearn, Out of
the East, 1895, p. 103.)
- Chez presque routes les races noires de l'Afrique, les
amants ne
s'embrassent jamais, ni, d'ordinaire, les mères leurs
bébés (W. Roth,
Ethnological Notes
among the Queensland aborigines, p. 184).
- Chez les
Amérindiens, le baiser tactile est le plus souvent inconnu,
bien que çà et là, comme chez les
Fuégiens, les amants se frottent les joues l'une contre
l'autre ( Hyades et Deniker, Mission
scientifique du
Cap Horn, t. Vll, p. 245).
- Les Malais ignorent le baiser.
- Au
Queensland septentrional, dit Roth, les mères (mais non pas
les pères) embrassent les bébés, et le
baiser
est aussi pratiqué entre gens mariés. Mais Roth
ne peut
pas dire s'il s'agit d'une coutume introduite ; il ajoute que la
langue pitta-pitta possède un mot pour désigner
le
baiser.
- Mais il faut remarquer que, dans plusieurs parties du monde
où le baiser tactile, comme nous le comprenons, est
considéré communément comme inconnu,
il existe
tout de même entre la mère et le
bébé, et
cela semble confirmer l'opinion de Lombroso que le baiser des amants
est issu du baiser maternel. Ainsi les Zoulous Angoni du nord du
Zambèze embrassent leurs petits enfants sur les deux joues,
et
chez les Fuégiens, dit Hyades, les mères
embrassent
leurs bébés.
- Il paraît même
qu'au
début du Moyen Age le baiser n'était pas
très
répandu en Europe comme expression d'amour sexuel ; il
était plutôt un raffinement de l'amour,
pratiqué
seulement par les classes plus cultivées. Dans la vieille
ballade de Glasgerion, la dame soupçonna son visiteur secret
de n'être qu'un rustre, et non le chevalier qu'il
prétendait être, parce qu'en venant au lieu de son
maître pour passer la nuit avec elle il ne donna de baiser ni
en arrivant ni en partant, mais la rendit simplement enceinte.
- Ce n'est que dans un état de civilisation
relativement
élevé que le baiser s'est
développé dans
l'art de l'amour. L'auteur arabe du Jardin parfumé, par
exemple, ouvrage qui révèle l'existence d'un haut
degré de culture, insiste sur la grande importance du
baiser,
surtout de celui appliqué à
l'intérieur de la
bouche, et il cite un proverbe : "Un baiser humide est
meilleur
qu'un coït précipité. "
- Les
auteurs
érotiques, hindous, latins et plus modernes, font
fréquemment des allusions à ces baisers, ainsi
qu'à ceux sur la bouche en général
comme
méthode la plus efficace pour inspirer l'amour.
- Le fait que dans l'Orient antérieur le baiser
était
largement monopolisé pour des usages sacrés a pu
constituer un empêchement pour le développement du
baiser dans la direction sexuelle. De sorte qu'on n'en a pas
facilement distingué la puissance érotique.
- Chez
les
anciens Arabes, les dieux étaient adorés au moyen
d'un
baiser (Osée Xlll, 2 ; I Rois
, XIV,
18). C'était la manière ordinaire de
saluer les
divinités de la maison en entrant ou en sortant (Wellhausen, Reste Arabischen Heidenthums, p. 109).
- À Rome, le baiser était un signe de
vénération
et de respect, beaucoup plus qu'une méthode d'excitation
sexuelle (Les Romains reconnaissaient au
moins trois
sortes de baisers : l'osculum pour l'amitié,
donné sur
le visage ; le basium, pour l'affection, sur les lèvres ; le
suavium entre les lèvres, réservé, aux
amants
(N. D. A.)).
- Chez les chrétiens primitifs, le
baiser
avait une signification presque sacramentelle. Il conserve son sens
ancien et sérieux dans plusieurs usages des
églises
d'Occident et plus encore de celles d'Orient ; les reliques des
saints, le pied du pape, les mains des évêques
reçoivent des baisers autant que les images des dieux chez
les
Grecs anciens. Nous avons encore dans notre entourage un cxemple
légalement reconnu du caractère sacré
du baiser,
dans la forme du serment prêté en baisant le
Nouveau
Testament.
- Jusqu'ici nous nous sommes surtout occupés du
baiser tactile, qu'on suppose parfois avoir pris origine, dans des
temps éloignés, à l'est de la
méditerranée, où le vassal embrassait
son
suzerain et où le baiser d'amour était connu des
Hébreux, comme nous l'apprenons par le Cantique des
Cantiques. Ce baiser tactile a conquis maintenant presque la
totalité
de l'Europe.
- Mais une autre sorte de salutation, le baiser olfactif,
règne sur une bien plus grande partie du monde et
mème
dans un coin de l'Europe, en Laponie, et chez les Yakouts de
Sibérie. Ce baiser varie de forme dans les
différentes
régions et ressemble parfois à un baiser tactile,
mais
comme il existe en Chine, où il a été
soigneusement étudié par d'Enjoy, on peut dire qu
il
consiste en trois phases : 1° le nez est appliqué
à la joue de la personne aimée ; 2° il y
a une
longue aspiration nasale, accompagnée d'un abaissement des
paupières; 3° il y a un léger claquement
des
lèvres sans application de la bouche à la joue
qu'on
embrasse.
- Le processus entier, dit d'Enjoy, est fondé sur le
désir sexuel sur le désir de nourriture, l'odorat
étant le sens employé dans les deux cas. Dans la
forme
décrite par d'Enjoy, nous avons la
variété
mongole du baiser olfactif.
- Pour les Chinois, le baiser
européen est répugnant ; ce baiser les fait
penser
à des cannibales voraces, et dans les colonies
françaises les mères jaunes font peur
à leurs
enfants en les menacant de leur donner le baiser du blanc. Les
Chinois regardent leur propre baiser comme exclusivement voluptueux :
il n'est convenable qu'entre amants, et non seulement les
pères évitent d'embrasser leurs enfants, sauf
tant que
ces enfants sont très jeunes, mais même les
mères
ne donnent à leurs bebés que des baisers rares et
furtifs.
- On rencontre le baiser olfactif chez certaines tribus des
collines du sud-est de l'lnde; le nez est appliqué sur la
joue
pendant la salutation, avec une forte inhalation. Au lieu de dire "embrasse-moi" on dit "renifle-moi".
- Un correspondant médical de Ceylan m'informe que
les Tamils
ne se donnent pas de baiser pendant le coït, mais on se frotte
le nez et on se lèche la bouche et la langue l'un de
l'autre.
- Le baiser olfactif est connu en Afrique. En Gambie, dans l'Afrique
occidentale, un homme qui salue une femme prend la main de cette
femme, la porte au nez et en sent deux fois le dos.
- Chez les Jekris
de la Nigérie, les mères frottent leurs
bébés de leur joue ou de leur bouche, mais sans
baiser
: les amants ne connaissent pas non plus le baiser, mais ils se
serrent l'un contre l'autre et se caressent (Journal
Amhr. Inst. août et novembre 1898, p.107).
- Chez
les
Swahilis, il y a un baiser olfactif et on apprend aux
garçons
en très bas âge à soulever leurs
vêtements
devant des visiteuses qui sentent alors le pénis avec
enjouement ; cette action de l'enfant s'appelle "donner du
tabac" (Velten, Sitten und
Gebraüche, etc.,
p. 142).
- Il semble que chez une grande partie des
Amérindiens on ne donne pas de baisers aux enfants. Im Thurn
constate que le baiser est inconnu des indigènes de la
Guyane,
et à l'autre bout de l'Amérique du Sud, Hyades et
Deniker constatent qu'il est inconnu des Fuégiens.
- Dans
l'Amérique du Nord, le baiser olfactif est connu des
Esquimaux, et on l'a rencontré chez quelques tribus
d'Amérindiens, comme les Pieds Noirs. La même
chose est
vraie pour la Polynésie.
- À Samoa, le baiser se faisait en
sentant (Turner. Samoa, p. 45).
En
Nouvelle-Zélande, le hongi, ou serrement des nez,
était
le baiser de bienvenue, de deuil et de sympathie (Tregear.
Journal Amhr. Inst. ,1889). Dans
l'archipel malais, on dit que le même mot signifie "saluer" et "sentir". Chez les
Dayaks de
l'archipel malais, l'usage du baiser est inconnu, d'après
Vaughan Stevens (Zeischrift für
Ethnologie,
1896, fasc. 4, p, 272).
- À Bornéo, dit
Breitenstein (Breitenstein, 21 Jahre in
Indien, t. 1, p. 224) , baiser c'est sentir et est
désigné par le mot
qui signifie "sentir "; mais cet auteur n'a jamais
vu un
homme embrasser une femme ; cela se fait toujours dans
l'intimité.
- On voit donc que le baiser olfactif est beaucoup plus
répandu que le baiser tactile de l'Europe, ou
plutôt de
la Méditerranée. Mais dans son
développement le
plus complet, le baiser olfactif se trouve surtout chez les peuples
de race mongole, ou chez les peuples jaunes qui leur sont plus ou
moins apparentés.»
Éditique : Dr Lucien Mias - 22 juin 2009
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