« Accompagner quelqu'un ce n'est pas le précéder, lui indiquer la route, lui imposer un itinéraire, ni même connaître la direction qu'il va prendre. C'est marcher à ses cotés en le laissant libre de choisir son chemin et le rythme de son pas »
Père Vespierren, Face à celui qui meurt .Accompagner c'est permettre au mourant de conserver un sens humain à ce qu'il vit, de trouver ses propres points de repère, de ne pas perdre son identité et de se réconcilier avec lui-même, c'est l'aider à passer à autre chose et à faire face à beaucoup de fins à la fois, donc à faire ses propres deuils, à faire des choix. En bref, c'est lui donner la possibilité de vivre sa mort, d'avoir encore des droits à faire respecter.
- « Et il revint vers le renard : - Adieu, dit-il...
- Adieu dit le renard, voici mon secret. Il est très simple : on ne voit bien qu'avec le coeur. L'essentiel est invisible pour les yeux.
- L'essentiel est invisible pour les yeux, répéta le petit prince afin de se souvenir.
Je vous ai dit : « Témoignez au mourant un amour inconditionnel. » Mais dans certaines situations, cela est loin d'être facile. Peut-être y a-t-il entre la personne et nous tout un passé de souffrance ; la façon dont nous avons agi envers elle autrefois peut nous avoir laissé un sentiment de culpabilité à son égard, ou bien nous éprouvons du ressentiment et de la colère en raison de sa conduite envers nous.
J'aimerais vous présenter ici deux moyens très simples qui vous permettront de libérer votre amour pour la personne en fin de vie. Mes étudiants qui assistent les mourants, et moi-même, en avons vérifié toute l'efficacité.
Tout d'abord, considérez cette personne qui est là devant vous comme s'il s'agissait de vous-même : elle a les mêmes besoins, le même désir fondamental de connaître le bonheur et d'éviter la souffrance, la même solitude, la même peur de l'inconnu, les mêmes zones secrètes de tristesse, les mêmes sentiments d'impuissance à peine avoués.
- Imaginez-vous vous-même sur ce lit, confronté à votre propre mort. Imaginez que vous êtes là, seul, et que vous souffrez. Posez-vous alors vraiment ces questions : de quoi aurais-je le plus besoin ? Qu'est-ce qui me ferait le plus plaisir, qu'aimerais je vraiment recevoir de l'ami en face de moi ?
Rappelons-nous, recommande Cicely Saunders que, lorsque nous accompagnons les mourants, nous ne sommes pas les seuls à donner. « Tôt ou tard, tous ceux qui assistent les mourants découvrent, face à leur endurance, à leur courage et souvent même à leur humour, qu'ils reçoivent plus qu'ils ne donnent. Cela, nous devons le leur dire...»
L'accompagnement n'est pas un état mais un mouvement.
- Lorsque la communication verbale est possible, le mourant peut faire part de ses désirs : l'accompagnement est actif, parce que le mourant est actif, ne serait-ce que dans sa parole.
Dans l'attitude d'écoute, il n'y a pas que les
oreilles qui travaillent, car c'est encore une affaire de coeur. Que
dit le malade dans ses expressions orales ?
Il peut avoir des paroles agressives, chargées ou non de
sous-entendus, la goutte d'eau peut faire déborder le vase.
« Quand on marche sur une abeille, même au moment où elle meurt, elle vous pique encore au pied. Bien sûr, cela ne lui sert à rien de piquer puisqu'elle doit de toute façon mourir piétinée, mais tout de même elle a bien fait de piquer avant sa mort. C'est ainsi qu'elles font, les abeilles. Moi aussi je me révolte contre ma mort imminente, moi j'ai horreur d'être exterminé, moi aussi je pique avant de mourir. Ce ne sont pas seulement les abeilles qui font cela, les hommes en font tout autant.» Fritz Zorn-Mars
Un soin donné sans parole échangée risque fort d'être perçu par celui qui le reçoit (ou le subit) comme une négation de sa condition de sujet, une réduction à l'état d'objet.
- " Pour ce malade il n'y a plus rien à faire... La partie est perdue. Nous ne pouvons le garder... Il faut le passer aux moyens séjours ", ou bien : " Isolons-le, que les autres malades ne le voient pas "
- M. X. a dit: "Je vais mourir, est-ce difficile de mourir?" J'ai envie de répondre : "Mais voyons, ne parlez pas de cela, ne dites pas de bêtises, qui parle de mourir ?"
- "Vous bougez trop. Restez tranquille, vous allez arracher votre perfusion, on va vous attacher... on va vous faire une piqûre si vous continuez."
- " Vous n'avez encore rien mangé .. Comment voulez-vous prendre des forces ? Vous cachez vos médicaments dans le tiroir. Si vous continuez, on sera obligé de le dire au médecin."
- " Qui va s'occuper de M. X...? - Pas moi, je suis bourrée de travail. D'ailleurs on ne peut rien en tirer. Et de toutes les façons il est inconscient. Cela n'a plus aucune importance."
- L'agressivité du malade entraîne celle des familles et celle du personnel soignant.
- La dépression provoque soit le découragement de l'entourage, soit sa colère.
- Garder son calme.
- Apprendre à poser une main sur le front ou sur le bras. Caresser une joue.
- Réfléchir avant de parler. Se taire parfois. S'asseoir au bord du lit.
- Apprendre à dire : "Je ne vous abandonne pas tant que vous ne vous sentez pas mieux ", ou encore : "Je comprends. Votre maladie n'est pas facile à vivre." " Que pouvons-nous faire pour vous qui vous ferait plaisir ? Vous aiderait ? Vous soulagerait ? "
- Un soignant ne se trompe jamais en faisant preuve de sérénité qui n'est pas à confondre avec l'indifférence mais au contraire porte la marque de compassion, d'une attention bienveillante et compréhensive. »
- « Mais les yeux sont aveugles, il faut chercher avec le coeur.» Le petit Prince
- On touche à des valeurs (authenticité, véracité. spontanéité, respect, amour, ouverture à l'autre et à soi), après une remise en question de nos propres valeurs, une recherche et un effort de conscience qui se résument en la reconnaissance de l'essentiel, la reconsidération des thèmes "sacrés" : la vie, la mort, Dieu...
- On touche à une dimension qui n'est plus matérialiste, même si on ne la conscientise pas : le mourant va franchir un seuil que nous ne connaissons pas, mais que lui peut-être entrevoit déjà.
- Bernard Martino rencontre un jour Myriam, une infirmière qui travaille dans un service d'orthopédie où rien n'est prévu pour la prise en charge du mourant. Elle lui parle de son horreur de la mort, bien que les choses fassent qu'elle soit toujours présente à ce moment là. Une fois, elle a ressenti très douloureusement le décès d'une vieille dame, elle a eu l'impression " de sentir très fort que quelque chose s'échappait du corps de cette personne et traversait le mien". » Claire Steinhauss
- « Il est toutes sortes de jardiniers...et les meilleurs d'entre eux peuvent faire pousser un lys dans un désert de pierres et dans les marécages un olivier... »
- Oria, L'évangile de la Colombe.