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Projet de vie, projet de soins

Les soignants  
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Attendus pour un projet  - Le projet de soins - Les résidents -Les soignants 

Une fois formé aux soins de technique gestuelle, on considère habituellement tout soignant comme apte à tenir son rôle en gérontologie. On l'inclut dans un monde de fonctionnement et on lui demande de savoir être à la hauteur de la situation : "Tais-toi et rame". Tout le monde rame mais le bateau n'avance pas, car le tempo n'est pas harmonisé. Et la souffrance de voir qu'on reste en rade diminue la qualité du coup de rame et occasionne un climat orageux.
Il faut changer le mode de fonctionnement pour que tout le monde ait du ciel bleu au-dessus de la tête.

Gérer les conditions d'efficacité d'une équipe cela commence par une modification du vocabulaire des tutelles, des médecins et des soignants qui en opposition aux services "actifs", mettent les institutions pour personnes âgées en "hébergement", ce qui véhicule une idée statique. Or, notre service, très actif et en recherche, supporte amplement la comparaison avec d'autres services soi-disant "actifs".

Limite de tolérance et limite de performance

Le service actuel accueille trente-deux Résidents à l'entresol et trente-sept au premier étage. L'examen de la vie en communauté de ces deux unités nous a amené à conclure que le nombre optimum de Résidents par unité de soins est de trente. Pour des raisons qui concernent les soignés et les soignants.
En effet, s'occuper de trente personnes en perte d'autonomie est la limite de tolérance pour une équipe soignante active, favorisant la vie communautaire et dirigeant des activités d'éveil.
Trente Résidents nécessitent un effectif de quinze soignants environ, nombre qui constitue la limite de performance d'une équipe. Au-delà, la performance individuelle et globale diminue car les soignants se croisent mais ne se rencontrent plus, ni physiquement, ni sur les objectifs. L'hypertrophie de l'organisation entraîne l'atrophie des hommes.

Cette notion de vie d'une équipe soignante n'est pas intégrée dans la gestion de l'entreprise de santé hospitalière qui ne pense encore qu'en terme d'organigramme.
Or, une équipe, formée d'un certaine nombre de "cellules" différenciées, est un organisme dont le fonctionnement relève de la biologie (où le cadre infirmier stocke des informations et manage une équipe dont elle fait partie, joue le rôle génétique de l'ADN dans la cellule vivante) alors qu'un organigramme relève de la logique de l'organisation.
Dans le premier cas, l'association des compétences donne une personnalité ; dans le second cas, l'association des titres donne un plateau technique. Les soignants doivent intégrer la notion que si la constitution du plateau technique est du ressort de l'administration, la création de l'équipe leur appartient.
La suppression du terme "surveillante" qui par sa connotation scolaire ou carcérale, déclenche une décharge d'adrénaline sur les cellules est une avancée. Les mots causent des maux..

Remise en cause du morcellement taylorien, obstacle aux relations humaines

La première phase a consisté dans la rupture avec la procédure de fonctionnement antérieure. Cette rupture a demandé un effort important de la part du personnel, qui a été soumis à un haut niveau de contraintes du fait de la remise en question d'acquis stéréotypés et de la mise en oeuvre de la responsabilité au lieu de la triade soumission-confort-démission. Se sentir responsable, invite à mobiliser ses capacités à chercher, à inventer, à créer un projet et prendre du plaisir à le réaliser, a été au début très inconfortable pour le personnel. Mais cette voie est la seule qui conduise au professionnalisme, qui n'est pas la condition de la compétence mais la conséquence de son exercice.

Le "tous capables" est une valeur humaniste et, eu égard à la mission du service de Service de soins de longue durée, une valeur nécessaire. "Je cherche, donc j'apprends" en est une mise en oeuvre. La hâte d'expliquer ampute souvent du plaisir d'exister en découvrant, car elle prive du "J'imagine, donc je suis". Mais pour concrétiser l'action à partir d'une représentation du réel espéré, il faut une trame afin de concentrer les idées multiples. Il a donc fallu débuter sur un modèle théorique, à partir duquel les modalités de réalisation ont été laissées à la disposition des participants directement impliqués dans la marche du service.
Si, durant la première année, il a été nécessaire de convaincre que le possible fait partie du réel, actuellement, le mûrissement des acquis permet de faire accepter que l'impossible, jusqu'à preuve contraire, est possible.
Nous allons vers une éducation du comportement face à un problème, au lieu de n'exécuter que des tâches, étrangères au projet individuel et global.
Antérieurement, l'accumulation importante de travail effectif, sans projet défini avait trois effets négatifs : sur le rapport soignant-travail, sur la marche du service et sur l'image de marque offerte à la population. Le travail effectué n'avait de sens que parntre soignants et avec les Résidents.
Pour qu'une idée avance il faut dix ans de traversée de dunes, avant devoir la lisière de l'oasis ! « Le travail en série que l'on peut percevoir dans les applications du système taylorien nous mènera d'une souffrance physique à la désorientation sociale, par la prise de conscience de ce qui est fait sur le sujet handicapé, par sa transformation en objet, en « corps-matière » Face à l'incompréhensible, cette désorientation s'accentue du sentiment d'impuissance et de la perte des significations des actions des soignants.
La perte d'initiative qui en résulte modifie la personnalité du soignant ; il perd, soumis à cette violence à son égard, la conscience des priorités humaines pour ne plus devenir qu'un «
corps-outil ».
La
haine devant le corps du sujet fragile, vu comme une simple addition d'organes, devient possible. Elle est source de révoltes et autres violences. » Michel Personne

Mise en place d'une méthodologie commune d'étude des problèmes

Dès qu'on se fixe un objectif en équipe, il faut chercher ensemble comment l'atteindre. Des solutions différentes sont proposées par chacun des équipiers en fonction de critères qui sont issus de leur personnalité, cigale ou fourmi. Les discussions s'éternisent, favorisant la poursuite de l'inaction et, lorsque la décision est prise, chacun continue de camper mentalement sur ses positions, ce qui retentit sur la réalisation de l'action. Définir différents points à analyser avant de proposer une solution permet à chacun de suivre la démarche des autres.
Nous avons adopté une démarche élaborée à l'université de Grenoble dans un cadre transdisciplinaire regroupant un large éventail d'enseignants allant des mathématiques à l'éducation physique, car elle semble applicable dans toutes les situations. En effet, que l'on fasse un travail au EHPAD ou dans un autre service, à la maison, au jardin, de la maçonnerie, des maths, du sport, résoudre un problème demande qu'on réfléchisse selon cinq principes : nécessité, simplicité, économie, efficacité et pré-action. Raisonner ainsi constitue une méthode reproductible de solution des problèmes. Il convient donc de former chacun à cette base de pensée organisée et organisante pour l'action concrète.

La nécessité d'atteindre un objectif passe obligatoirement par la recherche permanente d'une adéquation entre la simplicité, l'économie mais aussi l'efficacité : il faut aboutir...

Créer les conditions du changement

Il est illusoire de penser que le changement ne puisse être effectué que par décrets venus d'en haut, car la résistance au changement est le fruit des habitudes, et les ministres changent... L'ouverture vient souvent de la base, et le ressac de la vague atteint le sommet. Mais il faut, à un certain moment, institutionnaliser le projet après l'avoir défini, pour convaincre la direction, dispensatrice des moyens, de son utilité ; programmer l'action ; donner des "outils-leviers" du changement aux soignants.
Le projet a découlé des besoins des Résidents mais a tenu compte aussi d'un choix économique : essayer de maintenir une adéquation entre les revenus des retraites versés dans notre région et le prix de journée. Un prix élevé exclut les revenus les plus humbles et/ou met en jeu l'aide sociale. Cette dernière solution entraîne des retentissements divers sur la famille, avec en retour une modification négative de ses relations avec le Résident, contrariant la santé de celui-ci.
Le rôle des pilotes est de fixer les objectifs stratégiques à privilégier, de se doter des moyens pour y parvenir et de fixer des échéances. Nous nous étions fixés trois mois (cent jours) pour définir le projet, un an et demi pour le mettre sur les rails et trois ans de plus pour le réaliser. L'objectif de mise à niveau minimum des structures et du fonctionnement a été atteint dans le délai imparti. Une fois cet objectif réalisé, les thérapeutiques non médicamenteuses et les évaluations ont pu se développer donnant forme au projet... qui ne sera jamais fini car plus on avance dans sa réalisation, plus on découvre des possibilités nouvelles de recherche-action.
Pour atteindre un objectif, on ne doit pas sans cesse demander des efforts, mais créer les conditions pour que l'effort soit accompli de lui-même pour "se" dépasser.
L'effort doit être à la mesure des possibilités, mais l'effort est nécessaire pour réaliser et apprendre. Si le "service" n'apprend pas, le fait d'exécuter seulement des ordres fragilise sa pérennité potentielle, en créant des conditions de désinvestissement qui conduisent inexorablement à la non-performance puis à l'incompétence en fonction des objectifs fixés. Il y a donc une fonction d'enseignement de la direction médico-infirmière du service. Comme "on n'enseigne pas ce que l'on veut, le plus souvent ce que l'on peut, toujours ce que l'on est" il est important que les pilotes montrent une cohérence entre leurs pratiques et les dires. C'est une condition sine qua non.

Formation et responsabilisation des soignants

Il faut aussi qu'il y ait une adhésion de tous au projet. Celle-ci n'est pleine et entière que si les soignants ont été partie prenante de sa définition et de la fixation des objectifs à atteindre pour le réaliser. Et que des formations théoriques, sur place, permettent de donner des outils intellectuels communs, d'autant mieux retenus qu'ils sont en corrélation avec l'activité soignante vécue au quotidien. Savoir et savoir-faire se complètent par une interaction constante théorie-pratique.

Il faut ensuite favoriser la résolution des problèmes par les soignants eux-mêmes. Cela les oblige à prendre leurs responsabilités en discutant sur un pied d'égalité avec les autres, ce qui favorise la disparition du non-dit, première source de conflits. De plus, mettre tout soignant en situation d'apprendre à "solutionner" lui permet de se construire au fur et à mesure qu'augmentent ses savoirs et ses compétences. À l'inverse, créer des automatismes le met dans l'impossibilité d'être efficace devant des problèmes différents. Exister permet à chacun de mieux travailler. On travaille mieux :

- quand on va au travail avec plaisir ou tout au moins sans déplaisir (entendre une infirmière dire qu'elle vient maintenant travailler en chantant alors qu'elle venait en pleurant est un hommage au projet) ;
- quand on a une activité de recherche (chaque année est définie une recherche couplée avec l'action) ;
- quand le travail est socialement reconnu et donc gratifiant (c'est le rôle de faire-savoir de nos bilans, du bouche à oreille, des contacts avec d'autres soignants de Service de soins de longue durée) ;
- quand dans son action on découvre le sens de ce qu'on fait (une brochure "accueil soignant" explique nos choix et pratiques aux soignants qui n'ont pas connu le début du projet) ;
- quand il est permis d'organiser les détails de son action selon sa personnalité (autonomie, auto-contrôle et responsabilisation sont inclus dans l'organisation du travail) ;
- quand on n'est pas angoissé (le droit à l'insuccès précoce est reconnu) ;
- quand on est en situation de sécurité dans l'équipe (réunion d'information et de discussion ouverte, transparence des décisions une fois par semaine le mercredi) ;
- quand on est placé devant la nécessité de trouver des solutions plutôt que d'utiliser le même moyen apporté par d'autres (toute proposition d'activité d'éveil est testée sous la direction de celui qui la propose) ;
- quand le but à atteindre paraît accessible eu égard aux résultats intermédiaires (les évaluations permettent de visualiser des progrès spectaculaires de certains Résidents) ;
- quand son statut dans le groupe est positif (être ignoré est inhibant) ;
- quand la définition du rôle, clairement déterminé, n'empêche pas d'interférer dans la hiérarchie ;
- quand on sait que le mode de travail actuel est transposable ailleurs (entreprise, maison ou association) et affine l'intelligence (l'efficacité).

La complexité du problème, montre que l'on ne peut ravancer que par touches successives, certains détails n’apparaissant qu’au fur et à mesure de notre fonctionnement.

Changer de mode de pensée et de fonctionnement

Tout Soignant en EHPAD a son rôle propre et nous avons tous un rôle en commun : réactiver les fonctions restantes des Résidents. Pour cela il faut d'abord privilégier une approche optimiste des problèmes, dont un exemple est constitué par le regard qu'on porte sur une bouteille remplie à moitié : pour les pessimistes elle est à moitié vide, pour nous elle est toujours à moitié pleine. Aussi voyons-nous chez un Résident qui nous est confié, plus ce qui reste que ce qui manque et au lieu de nous lamenter, nous pensons à ce qu'il faut faire pour développer les capacités restantes.
Cette vision paraîtra hors-jeu, à ceux qui vivent un quotidien routinier, négatif et désespérant, dans un lieu statique. La force des habitudes, la croyance que tout est figé (lorsque la technique bio-médicale, après bilans a fait un catalogue des déficits d'organe) associées à la charge en travail, paralysent les initiatives éventuelles de soignants. Or, à partir de l'entrée du Résident dans un établissement de Service de soins de longue durée, il ne s'agit plus de soigner une maladie mais de pratiquer des soins de santé, cadre où les médicaments ne deviennent qu'un élément d'un tout thérapeutique dont les soignants sont la première richesse. En effet, c'est grâce à leurs activités tout au long de la journée que les Résidents vont se recréer au mieux.
Vivre pour les Résidents, c'est créer du mouvement en bougeant ; créer une utilisation du temps en rythmant les besoins et en réalisant les actes usuels de la vie quotidienne ; créer des plaisirs du corps en ajoutant ou répétant des acquis sensoriels ; créer des apprentissages nouveaux. L'ensemble donnant une image de soi en relief dans le temps et dans l'espace, qui associe un "être mieux dans sa tête" en parallèle avec un "être mieux dans sa peau".
Pour le soignant aussi, vivre c'est créer. Les tâches domestiques et corporelles du quotidien étant très lourdes en Service de soins de longue durée, les soignants ont l'impression de travailler "pour rien" s'il n' y a pas, à côté du travail répétitif, d'actions valorisantes. Celles-ci permettent d'être une "personne", c'est-à-dire un individu doué de liberté de choix donc responsable de ses actes, ayant des relations sociales de communication, reconnu par les autres comme une entité propre, capable de vivre en communauté dans le respect de l'autre considéré comme homme libre lui aussi. Le terme de personne va au-delà de l'image du corps, en englobant tous les acquis culturels qui contribuent au profil psychologique de chacun, et sous-entend une création continuelle qui n'est perceptible que sur la durée.
Ici et maintenant, tout le monde "existe", les soignés comme les soignants. La responsabilité remplace la soumission, le droit à l'erreur existe et la non-réussite précoce est tolérée car elle sous-entend que l'on agit et a valeur d'apprentissage.
La formation permanente discontinue a été fort judicieusement organisée par la responsable du service infirmier. La formation à la manutention a été confiée à de jeunes formateurs externes dont les préoccupations relationnelles du geste rejoignent les nôtres, des stages sur l'accueil, la communication, l'hygiène, la communication tactile sont en cours car la formation... continue. Ces formations de base axées sur le rôle propre des soignants sont dispensées aux seuls volontaires, car il faut vouloir apprendre pour retenir. Des formations sont possibles en dehors de l'établissement pour l'apprentissage de techniques ciblées, diffusées ensuite à l'ensemble de l'équipe. Être à la fois formé et formateur est riche d'enseignements.
La vie dans l'EHPAD, tel que nous la vivons, est le cadre où le rôle propre du personnel soignant prend toute son ampleur et a une action thérapeutique déterminante. Par contre, du fait de nos choix relationnels plus que médico-techniques, les gestes techniques d'investigation corporelle y sont limitées. Pour qu'il n'y ait pas un sentiment de "perte de valeur", dans un monde hospitalier où le vécu infirmier privilégie, en général, les actions instrumentales, il nous semble judicieux, pour éviter une glaciation du corps infirmier, de prévoir tous les trois ans un "stage" de six mois dans un autre service. Le cloisonnement ne nous paraît pas souhaitable pour l'accomplissement d'une vie professionnelle, après avoir vu certaines infirmières de bloc s'épanouir en s'occupant des personnes âgées et certaines aides-soignantes découvrir un monde en passant de gériatrie en service de court séjour.
La brève durée de séjour en service de pathologies aiguës prive le soignant de la plus grande partie de son "rôle propre". La dimension cachée du rôle du soignant n'est pas perceptible quand on traite au cours de trois jours d'hospitalisation un organe malade.
Le corps de l'autre est considéré dans sa dimension d'organisme en panne, à réparer et on ne va pas s'investir dans... le reste.
Et, peu à peu on perd la notion de cet "essentiel" qu'on escamote en "reste", répondre à la détresse du "sujet" malade dans son corps-objet.
Dès que les séjours s'allongent, il faut tenir compte de la notion de temps sans rien faire, de temps vide ; de la notion d'inutilité sociale ressentie par le malade ; de l'absence des stimulations sensorielles de la vie quotidienne. Le soignant d'aigu déplacé en Service de soins de longue durée se trouve alors démuni, culpabilisé par son manque de savoir-faire. Il se réfugie dans la taylorisation des tâches qui lui permet de faire le minimum acceptable pour ne pas se faire exclure de son propre "Moi" par son subconscient, qui lui rappelle qu'il est humain avant que technicien. Le mal-être s'exprime alors par le déplacement des responsabilités propres sur d'autres soignants et l'isolement. Dire "ce n'est pas intéressant" est un signe d'incapacité d'adaptation à de nouvelles compétences.

Le changement des mentalités : une lente contagion

La médecine au cours des quarante dernières années a fait un bond prodigieux au point de vue technologique mais les mentalités hospitalières sont restées celles de la France rurale persuadée que tout est acquis à vie dès qu'on est "dans la fonction publique", ce qui favorise les pratiques routinières. Or, les temps changent et la notion "d'entreprise" qui a déjà pénétré d'autres administrations de service public va entraîner des modifications de la gestion hospitalière...et de la routine.
Les soignants du Service de soins de longue durée ont quitté une pratique routinière statique, pour définir en commun une pratique dynamique. L'adhésion au projet a posé quelques problèmes à certains agents qui s'étaient construits un monde centré sur l'activité "hygiène" qui les protégeait des relations humaines. Les relations entre collègues étaient orientées, pour ce type d'agent, vers des riens de préséance, la surveillante étant "fayotée" comme jadis la soeur. On ne pouvait pas concevoir les collègues comme soutien interactif dans le service, puisque aucun projet n'existait.
L'administration a été surprise par le projet car les conduites à tendance humaniste ne sont pas incluses dans la tradition de gestion des Services de soins de longue durées, considérés comme lieux où la mission consiste à assurer la nourriture et l'hygiène de base.
Tout le monde, actuellement, adhère au projet, et même si sa réalisation est sujette à des variations saisonnières, nous avons une réalité tangible qui a un effet d'entraînement par l'exemple.
Ce qui conforte la notion que l'absence de projet conduit à la routine qui entraîne à son tour l'absence de projet. Absence de projet-routine-augmentation de la dépendance-charge en travail accrue, se succèdent et s'entretiennent empêchant de penser des soins différents. Le soignant se crée alors un territoire personnel d'activité (hygiène des sols, actes techniques infirmiers ou hôteliers) sécurisant, pour couvrir sa responsabilité si la hiérarchie se manifeste.
Ce territoire correspond au minimum légal et visible de la définition de son rôle pour ne pas se faire sanctionner. En effet, avoir un Résident souriant, habillé et debout n'est pas traduit en somme de travail par des tiers non compétents en gérontologie ; avoir un chrome qui brille, oui. Mais n'avoir que le souci de l'hygiène de surface (corporelle et des sols) sans se soucier de la vie neuro-psychologique des Résidents rend le "rôle propre" infirmier vide de sens.

La motivation, critère d'une responsabilisation réussie

L'objectif une fois fixé, il faut que chaque participant à la marche du service réalise son action personnelle. Cette solution personnelle doit être le fruit d'une synergie activité cérébrale-conduite motrice car elle débouche sur la prise de conscience par chaque soignant de son rôle dans la "thérapie non médicamenteuse". Si le problème le plus difficile est de réduire l'inhibition (oser oser) afin de mieux percevoir et mieux réussir, cela implique de mieux réussir pour diminuer l'inhibition et mieux percevoir. Il y a donc un système interactif personnel où la volonté est déterminante.
La mémorisation permet d'accumuler des connaissances, d'engranger des matériaux. L'intelligence, c'est l'efficacité avec laquelle, grâce à ces matériaux, on va synthétiser, donc être efficace. La différence d'intelligence (d'efficacité) de la personne est fonction du nombre de rapports qu'elle a eus avec des problèmes concrets. Plus on a de problèmes à résoudre, plus on apprend, plus on devient efficace ; moins on vieillit. Le niveau de synthèse peut être différent d'un individu à l'autre avec les mêmes matériaux : y-a-t-il eu le même vouloir ?
Encore faut-il que le jeu en vaille la chandelle, c'est-à-dire que l'activité soit socialement reconnue et appréciée.
La motivation n'est pas un "état de grâce révélé". C'est la résultante et le critère d'évaluation d'une responsabilisation réussie.

« La qualité d'une institution repose beaucoup plus sur le mode de résolution des difficultés élaboré et appliqué par les différents intervenants, que sur la qualité des aménagements décoratifs ou architecturaux, ou encore, sur le nombre et la diversité des spécialistes en tous genres figurant à l'organigramme » Louis Ploton

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juin 1992 - actualisé le 24 juin 2009
Dr Lucien Mias - Equipe soignante