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S'accomoder d'une déficience
de l'odorat et du goût images/logoPdf8k.jpg
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- Ces sens de la perception chimique.
- Sentir et goûter au quotidien.
- L’effet du vieillissement sur l’odorat et le goût.
- Les conséquences du déclin du goût et de l’odorat.
- Suggestions pratiques.


On ne peut dissocier l’étude du goût et de l’odorat : dès son premier rhume mon lointain ancêtre L’homme de Tautavel1 a compris que l’odorat et le goût étaient reliés... et que son meilleur traitement était la chaleur de la grotte.

Ces sens de la perception chimique
    Le goût et l’odorat obéissent à des mécanismes compliqués qui ne sont pas encore parfaitement connus ; on sait toutefois qu’ils s’altèrent avec l’âge.
L’odorat et le goût sont deux systèmes distincts, mais les deux s’appuient sur des expériences physiologiques et psychologiques.

  • La composante physiologique consiste dans l’interaction de stimuli chimiques qui prennent source en dehors de l’organisme et des récepteurs situés dans le nez et la bouche ; les stimuli sont transmis par le système nerveux jusqu’au cerveau, où ils sont détectés, identifiés et mis en mémoire. 
  • Suit alors la phase psychologique (bien que la distinction entre les phases physiologique et psychologique soit difficile à faire) : l’impression produite par le stimulus, l’odeur ou la saveur est évaluée en fonction de son caractère agréable ou désagréable ; la personne compare cette information avec celle d’autres stimuli en mémoire et réagit, évitant les stimuli désagréables et recherchant ceux jugés agréables.
    Même si l’odorat et le goût agissent selon un principe simple, on en apprécie la complexité lorsqu’on pense aux multiples odeurs et saveurs qui existent, chacune ayant son propre système de perception : la saveur du beurre a vingt sept composantes et les odeurs sont encore plus compliquées ! Plusieurs stimuli agissent en même temps, en association avec d’autres facteurs.

    Toutes les odeurs sont des émanations volatiles. L’olfaction est activée lorsque les odeurs dispersées dans l’air sont dirigées par le mouvement de l’air vers le nez.

Les récepteurs olfactifs du nez sont composés de cellules dotées, à une extrémité, “d’antennes” minuscules et, à l’autre extrémité, de terminaisons nerveuses établissant une connexion avec le cerveau.
Soulignons que la sensibilité olfactive est 10.000 fois plus grande que la sensibilité gustative. Les maladies qui influent sur les récepteurs situés dans la cavité nasale (rhumes, allergies) entrainent une baisse olfactive et... gustative.

    Le mécanisme du goût, qui se produit dans la bouche, requiert la dissolution d’une substance aromatisée quelconque dans la salive qui, de son côté, baigne les papilles situées sur la langue.
Les papilles ne sont pas toutes gustatives ; certaines “lisent” la douleur et la texture.
Quatre goûts fondamentaux peuvent être différenciés: le sucré, le salé, l’acide et l’amer. Chacun a sa propre structure chimique, bien que certains composés amers et sucrés soient semblables. 

Les papilles fongiformes (qui ressemblent à des champignons) contiennent les bourgeons du goût qui sont sensibles surtout au sucré et au salé.
Les papilles rondes, beaucoup plus grosses, enregistrent les goûts amers.
Chaque bourgeon renferme à peu près cinquante cellules réceptrices qui vivent environ dix jours chacune et se renouvellent constamment.
Leur nombre varie d’une personne à l’autre.

    L’interaction entre les substances aromatisées et les bourgeons du goût est déterminée par le milieu buccal, notamment par l’acidité ou l’alcalinité de la salive. Ce résultat n’est pas nécessairement déterminé localement, mais peut dépendre du métabolisme.
Une étude sur les effets des médicaments sur le goût a montré que la salive contient de l’acide salicylique formé à partir de l’acide acétylsalicylique (l’aspirine),  en quantité correspondant à 2 % de ce qui est contenu dans le sang. La présence de cette substance influence la réponse aux aliments acides. Même la salive des personnes qui ne prenaient pas d’aspirine contenait des traces d’acide salicylique venant probablement de certains aliments, du dentifrice ou du rince-bouche utilisé.

    L’acuité gustative varie aussi d’une personne à l’autre.  
Il existe une absence génétique de goût d’un composé amer appelé phénylthiocarbamide (PTC), dont la structure chimique est semblable à celle des substances qui donnent par exemple au chou, au chou-fleur et aux choux de Bruxelles un goût amer.
Environ le tiers des personnes de race blanche et le dixième des Asiatiques ne trouvent pas le goût du PTC. Celles qui trouvent le goût sont accusées d’être plus “difficiles” que les autres !
 
    Le goût peut être altéré par une mauvaise denture  - dentiers mal ajustés, dents manquantes, caries ou absence de dents - une hygiène dentaire insuffisante, un manque de salive ou une modification de la fluidité de celle-ci.
Une étude  a montré qu’une bonne hygiène buccale pouvait augmenter de 68 % la capacité de reconnaître le goût “salé”.
Il se peut qu’une salive épaisse exige une stimulation plus longue pour absorber l’information sensorielle.

    Des troubles psychiatriques ainsi que des maladies - notamment des tumeurs cérébrales - peuvent amener une modification du goût et de l’odorat. Certaines modifications peuvent être dues aux médicaments.
On sait aussi que les traumatismes crâniens, la chirurgie du cerveau et la radiothérapie anticancéreuse altèrent les sens de la perception chimique.
L’altération peut varier : un seul élément - comme la perception de l’amer - peut être perturbé et l’effet peut être passager.
Le changement le plus fréquent est une diminution de l’odorat : perte permanente dans 1 % des cas et  perte temporaire dans 62 %.

    Les perturbations les plus désagréables sont causées par la distorsion du goût, la perception d’odeurs nauséabondes et la présence d’un goût métallique. Heureusement rares, elles surviennent parfois après la prise de certaines drogues, comme la cocaïne.

     Le goût et l’odorat sont des mécanismes adaptatifs. Une stimulation prolongée amène une diminution de la sensibilité : les mauvaises odeurs sont mieux tolérées ; les aliments acides deviennent moins désagréables et les aliments épicés, moins brûlants.
Les travailleurs indiens qui mangent régulièrement les fruits du tamarinier le trouvent moins amer que les étudiants qui en mangent occasionnellement ; les Mexicains qui consomment du piment fort depuis qu’ils sont jeunes ne le trouvent pas aussi piquant que les européens.

      Les résultats d’un sondage sur la sensibilité olfactive (réactions à six odeurs allant d’agréable à désagréable :  banane, clou de girofle, musc, transpiration et gaz)  indiquent que les personnes qui travaillent à l’extérieur ont une meilleure acuité olfactive que les employés de bureau ; leur exposition à l’air frais les aide peut-être à protéger cette acuité.

Sentir et goûter au quotidien

L’odorat et le goût sont les deux sens qui déterminent le plaisir de manger : ils  facilitent le choix des aliments et influencent l’appétit, l’apport alimentaire.
Certains goûts sont pleinement développés à la naissance : le nouveau-né aime déjà le sucré et déteste ce qui est amer.

“Système d’alerte précoce”, odorat et goût nous empêchent d’absorber des poisons amers, ce qui assure la survie de l’espèce.
Chaque sens joue peut-être un rôle précis dans le processus de survie :
— l'odorat nous alerte d’un danger ambiant lorsque nous sentons des émanations de gaz ou un aliment qui brûle ;
— la vue de la fumée nous avertit d’un incendie ;
— le goût d’un aliment est souvent notre premier indice de la salubrité de cet aliment ou de sa contamination.

L'effet du vieillissementsur l'odorat et le goût
« L'âge donne de l'arôme au vin, mais diminue notre capacité de l'apprécier ! »

Suggestions pratiques pour compenser les déficiences...
Voir  aussi sur le site  les textes argumentés suivants :
-  Le repas un plaisir... thérapeutique  
Prendre soin des repas de la personne âgée dysphagique
Le nez du soignant (Odeurs et comportements)
-  
L'odorat - Havelock Ellis in Études de psychologie sexuelle , 1935

Bibliographie
- Ackerman D., Le livre des sens, Grasset, Paris, 1990, 384 p.
- Arcand M., Hébert R., Précis pratique de gériatrie, Maloine, Paris, 1987, 629 p.
- Aron J-P., Le mangeur du XIX° siècle, Payot, Paris, 1989, 365 p.
- Blanc-Mouchet. J., L'odeur, l'essence d'un sens, Autrement, Paris, 1987, 213 p.
- Brillat-Savarin, Physiologie du goût, Flammarion, Paris, 1990, 400 p.
- Conseil consultatif sur le troisième âge du Canada, S'accommoder des pertes sensorielles, 1990.
- Demailly E., Manger pour ne rien dire, Gérontologie et Société, n° 34, FNG,1985, 5 p.
- Duperret Dolange H.,  Le « nez » du soignant, in L'INTERdit, n°30/31, 1995- Lauzon S., Adam E., La personne âgée et ses besoins, Seli Aslam, Paris, 1996, 867 p.
- Levesque L., Roux C., Lauzon S., Alzheimer, comprendre pour mieux aider, Erpi, Montréal,1990, 332 p.
- Ploton L., La personne âgée, Chronique sociale, Lyon, 1990, 244 p.
- Potter P.A. , Perry A.G., Soins infirmiers, théorie et pratique, ERPI, Montréal, 1990, 1605 p.
- Salomé J., Apprivoiser la tendresse, Jouvence, Onex, 1990, 164 p.
- Serres M., Les cinq sens, Grasset, Paris, 1990, 381 p.
- Sulger F., Les gestes vérité, Sand, Paris, 1991, 135 p.
Dr Lucien Mias - 13 mai 1993
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